Test de Deus Ex: Mankind Divided

En 2011, Eidos Montréal avait décidé de ressortir Deus Ex du placard. Et de quelle manière, puisque Human Revolution, c’était son nom, avait littéralement conquis le coeur de nombreux joueurs. Reboot audacieux, des mécaniques qui collaient littéralement la banane pour un jeu qui ne prenait pas le joueur pour un débile mental, faisait qu’il jouissait d’une très bonne aura. Mais Eidos ne pouvait pas en rester là, d’une part parce que scénaristiquement, Adam Jensen n’en a pas encore fini, et il fallait surtout un Deus Ex sur cette génération allant plus loin en tous points que le premier volet. Pari réussi ? Et bien, force est de constater que c’est une fois de plus le cas ! Malgré les craintes qu’on pouvait entrevoir d’un Human Revolution 1.5, Eidos a su retrousser ses manches pour produire l’épisode le plus calibré et le plus émotionnellement convaincant. Hmmmmmhh, ça sent déjà le potentiel GOTY, vous ne trouvez pas ? Verdict dans notre test de Deus Ex: Mankind Divided réalisé sur PS4 via une édition  Blu-ray offerte par Square Enix.

Agent 47 Jensen au rapport, j’ai oublié mon lance grenade

La bataille des organiques et des augmentés fait encore rage. Exit le transhumanisme. Les deux camps n’arrivent pas à trouver de terrain d’entente, la guerre économique qui en découle ravage tout, et on fait porter le chapeau à tout bout de champ aux deux côtés. La confrontation politique et militaire qui les oppose ne trouve pas de répit, à base de coup de pute des deux côtés, des choix cornéliens qui vont au delà du monde des bisounours. Autant de ficelles qui ont fait le charme de la série Deus Ex, dès Human Revolution. Dans Mankind Divided, la recette ne change en réalité pas, ou très peu sur les fondements, mais s’améliore en tous points. Que ce soit au niveau du gameplay, du level design que du scénario, tout est polishé pour livrer une copie sur laquelle Eidos a mis toute sa confiance. 

Adam Jensen revient plus armé que jamais. Après une petite diversion scénaristique bien trouvée, on revient au bon vieux temps de monter comme bon nous semble notre agent à nous, qui nous est propre, afin de l’adapter à notre style de jeu. Plutôt augmenter les compétences de la nanolame pour améliorer la discrétion, ou plutôt devenir un Adam Jensen sac à PV, armé d’un fusil à pompe, qui y va sans pitié ? C’était déjà le cas dans Human Revolution, mais Mankind Divided va bien plus loin, notamment grâce à l’arbre de compétences un brin plus poussé. Quelle richesse, amis joueurs. 

Notre Adam national déverrouille ainsi des compétences vraiment cools, grâce à des Praxis cumulés via votre expérience, qui en plus d’être esthétiquement sympas et utiles, ajoutent un côté tactique au level design qui se réinvente constamment. A l’image de HR, vous retrouverez vos compétences réparties dans chaque partie du corps, comportant pour chacune, un sous-arbre qui permet d’augmenter le niveau de cette augmentation. Et pour la partie personnalisation ce n’est pas terminé, puisque en plus de vos compétences, vous pouvez aussi améliorer vos armes et vos équipements. Modifier le canon, rajouter un viseur tactique, autant d’éléments personnalisables que les moins patients de l’infiltration se presseront d’obtenir. En complément, vous pouvez aussi augmenter les capacités de recharge, de munitions, de réactivité en plus de tout ce qu’on a énuméré, via des pièces détachées cachées partout dans le jeu. Le plus beau dans tout ça, c’est qu’on puisse le modifier en temps réel. Par exemple, pour les différents types de munitions pour une même arme (par exemple les IEM ou perforantes pour notre pistolet) vous pouvez les changer à la volée en plein gunfight. Le tout, est évidemment stocké dans votre inventaire, reprenant en tout point la logique de Human Revolution.

Chaque ressource, arme, grenade prend un nombre défini de cases dans votre inventaire, chose qu’il faudra prendre en compte car vous ne pourrez pas transporter toutes les munitions que vous allez trouver. Il va falloir choisir entre, les armes que vous préférez (les plus grosses prenant plus de place), quelles types de munitions vous souhaitez emporter, combien de grenades différentes transporter, combien de ressources pour le piratage faudra etc. Bref, un joli casse-tête qui apporte à ce Deus Ex toujours ce petit côté tactique qu’on aime tant, et qui, à l’ancienne, ne vous donne pas de balles de manière illimitée. Pour terminer sur cette partie, sachez que Mankind Divided rajoute une petite dimension de craft, grâce à des pièces détachées avec lesquelles vous pourrez fabriquer soit des minutions, soit des mines ou encore des multi-outils. Ce n’est pas l’élément central du gameplay, mais c’est une petite carotte supplémentaire qui marche plutôt bien dans l’ensemble.

Quand la grille d’aération de Deus Ex est plus bien intéressante que les 3/4 des AAA…

Parlons-en, du level design de Deus Ex Mankind Divided. Une fois de plus, Eidos Montreal a souhaité, en plus d’agrandir les différents terrains de jeu, conserver et rendre plus ludique chaque trajectoire que vous allez emprunter. On revient sur un terrain que l’on adore, à savoir les différents itinéraires possibles à chaque niveau. Il faudra bien évidemment faire un état des lieux afin de trouver toutes les entrées possibles, mais rien de nous empêche de varier les plaisirs. On peut très bien entrer par la porte principale, armée jusqu’aux dents, sans pitié, ou encore se cacher dans les grilles d’aérations pour contourner quelques salles pour rentrer ni vu ni connu, ou bien pirater des ordinateurs et portes d’entrée pour couper les trajectoires et ainsi opter pour un système de raccourci style porte battante à Ikea. 

Même si la comparaison avec Dishonored peut paraitre bancale étant donné que Human Revolution instaurait déjà cela, Deus Ex: Mankind Divided se rapproche davantage du titre de Arkane dans sa dimension liberté d’action et surtout recherche de solutions. Le jeu s’est tout de même bien élargi, et on abandonne légèrement ce côté couloir pour revenir à des zones plus larges et plus grandes à infiltrer. La complexité d’un level design, élément essentiel oublié dans les 3/4 des AAA vendu pour leurs réalisations, rentre ici comme étant l’élément clé du système de jeu de Deus Ex. D’autant plus que Mankind Divided bénéficie autant d’un level design carré et bien étudié que ce dernier est d’une finesse et d’une logique déroutante. Rares sont ces jeux où le simple fait de réfléchir par quel chemin passer et par quel moyen atteindre son objectif donnent un réel plaisir intense, quitte à faire et refaire certains passages.

Le jeu a bien des cartes dans sa manche, et il vous faudra plusieurs runs et pas mal d’analyses pour comprendre parfois que la solution qui vous paraissait la plus cohérente était en réalité une issue bien plus risquée. Et l’alternance des différentes situations renforce cette idée. Rien de nous empêche, comme ce fut le cas dans notre test du jeu, d’alterner les premières salles en infiltration et vous dire que la dernière, vous la terminerez au fusil d’assaut, ou inversement. Mankind Divided conserve donc les deux styles de jeu, à savoir action et infiltration. Vous pouvez finir le jeu dans le style que vous souhaitez. Vous pouvez très bien finir le jeu sans tuer personne et sans déclencher une alarme, pour les vrais, qui ne voit Deus Ex que dans ce style. Avec autant de possibilités et de variétés de situations, Mankind Divided nous conforte dans l’idée que le level design de Deus Ex reste parmi les plus soignés du marché. 

Le principal bémol pour les jeux d’infiltration de nos jours est bel et bien l’intelligence artificielle. Dans Mankind Divided, l’IA n’aura une fois de plus pas gagné un prix nobel, mais arrive tout de même à réaliser certains mouvements intéressants et arrivera sans problème à pénaliser le joueur si il tente des actes inconscients. L’IA arrivera parfaitement à vous contourner, à vous balancer des grenades bien placées pour vous déloger de votre cachette, et connaitra parfois les différents chemins possibles pour ainsi vous bloquer. Ce n’est qu’un exemple, mais l’IA peut très bien vous tirer dessus à travers les grilles d’aérations. Pour le reste, on reste sur du classique, mais suffisamment efficace pour vous opposer à un beau challenge. Le titre de Eidos ne réinvente pas le genre de ce côté là, mais de nos jours, proposer une IA correcte, relève déjà d’un bel exploit.

Mais que serait le piquant de Deus Ex sans son scénario tant adoré ? Même si ce dernier nous fait peur dès le début du jeu, avec des craintes que Eidos touche à une recette pourtant bien maitrisée, les différentes pirouettes scénaristiques nous rappellent que la narration typée Deus Ex est toujours parfaitement calibrée. Avec une narration en béton armée, le jeu se mange d’une traite et bénéficie d’une histoire et d’un background qui ne font qu’un. A tel point que les missions secondaires du titre, sont tout aussi importantes et tout autant scénarisées que les missions principales. Et là où le jeu montre que le joueur n’est pas considéré comme un enfant de 8 ans, les missions principales et missions secondaires se croisent régulièrement. Des actions provoquées dans des missions secondaires qui peuvent vous paraitre sans importance auront en réalité un impact bien plus délicat que vous ne l’imaginiez dans la trame principale. Rares sont les jeux à proposer autre chose que des quêtes FedEx pour les missions secondaires, là où Deus Ex Mankind Divided, vous incitera à toutes les faire pour ne rien louper. Brillant. 

Par contre techniquement, on peut rien pour toi…

D’un point de vue technique, Deus Ex: Mankind Divided assure le minimum, n’affichant réellement rien de choquant, mais en allant clairement pas dans la bafferie technique. Toutefois, même si l’ensemble reste soigné, notamment certaines textures vraiment canons, la technique convainc davantage quand on constate le nombre d’éléments affichés à l’écran. Le jeu fourmille de détails visuels, ne rend jamais un niveau austère, et regorge d’objets ou de décorations qui donnent une réelle vie aux différents lieux visités. Certes, certains environnements comme la Suisse ne donne clairement pas la meilleure copie visuelle du titre, mais des niveaux comme par exemple Golem City redonne déjà davantage le sourire. Autre bémol qui nous a agacé, des chutes de framerate sur consoles qui sont parfois insupportables. Ne vous étonnez pas qu’en pleine ville, quand vous balancez une grenade fumigène ou que vous courez à travers la foule, le jeu passe en dessous de la barre des 18-20 fps, ce qui donne des ralentissements notables. Des toussotements seulement présents, selon notre expérience, dans des zones plutôt ouvertes. 

Cependant, la technique se fait globalement étouffer par tout le travail artistique qui s’en suit. Deus Ex: Mankind Divided fait partie de ses jeux où la direction artistique gobe complètement les petits déchets techniques ici ou là, tant la cohérence du monde cyberpunk qui nous entoure donne un cachet visuel unique. Nombreuses sont les références à des films du genre, séries TV ou encore les anciens Deus Ex (notamment Human Revolution), avec des alternances de thèmes grisâtres, d’ambiances conspirationnnistes à tous les coins de rue, pour une société futuriste crédible dotée d’une dimension sonore en accord avec les graphismes.

Quand Eidos demande à notre jujotte de s’exprimer

Deus Ex: Mankind Divided réussit son pari. Il arrive, dans la finesse et la classe qu’on lui connait, à dépasser Human Revolution. Pas franchement étonnant, tout compte fait, tant Eidos Montréal montre avec cette suite leur pleine maitrise du sujet, du respect de l’univers, d’un gameplay jouissif, d’un level design digne des meilleurs et d’un scénario en béton armé. Et ce n’est pas les quelques chutes de framerate sur consoles qui viendront ruiner l’expérience, tant les petites tares ici et là sont minimes à côté de la qualité globale du titre. Il n’en fallait en réalité pas plus de notre côté pour nous convaincre que Eidos Montréal a réussi avec Mankind Divided à propulser la licence Deus Ex comme référence dans beaucoup de critères. Le joueur n’est pas tenu par le bras à chaque couloir, on lui laisse sa liberté à tout moment, le tout dans un univers qui force le respect. Si l’on peut terminer ce test sur une autre éloge, assurons que ce Deus Ex: Mankinded Divided ne rate pas le coche, et se présente comme l’un des meilleurs jeux de cette année 2016. 

Verdict : 18 / 20

  • Sadako

    Journaliste gaming et high-tech depuis 2009, je suis "Vanlifer" depuis 2021, dans mon camping-car équipé pour travailler sur les routes tout comme pour profiter de bons moments de détente !

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