En termes d’exclusivités, Sony s’est particulièrement bien occupé de sa PS4 jusqu’à présent, avec des titres en petite quantité, mais de très grande qualité comme Spider-Man, Detroit: Become Human ou encore God of War pour ne citer que ceux de 2018. Et si tous les yeux se tournent maintenant vers Ghost of Tsushima, Death Stranding et The Last of Us 2 en attendant la sortie de la PS5, Days Gone nous arrive après de nombreux reports. Une qualité aussi grande que les standards actuels des autres studios de Sony ? Verdict dans notre test de Days Gone réalisé sur PS4 Pro (et PS4 classique par Chris) via une clé PlayStation Store offerte par PlayStation France.
Une histoire de Zombies pas comme les autres ?
Un scénario classique mais prenant
Non, Days Gone ne révolutionnera pas la manière de raconter une histoire alors qu’une apocalypse zombie vient de déferler sur la ville de Farewell dans l’Oregon, aux USA. De manière classique, le début du jeu nous présente Deacon Saint John, héros de l’aventure, sa chère et tendre, Sarah, et Boozer, meilleur pote motard de Deacon « Deek » St. John. Quelques semaines après l’invasion des morts-vivants, Deacon décide de sauver la peau de Sarah en l’expédiant dans un hélicoptère du NERO (les « sauveurs » de civils) et en lui promettant de la retrouver au plus vite. La suite, vous la devinez, Sarah est introuvable, et le jeu débute plusieurs mois après cette séparation.
Pas originale pour un sou, cette histoire post-apocalyptique reste néanmoins passionnante à suivre, et bien que maladroitement narrée (nous y reviendrons plus tard), est suffisamment intriguante pour garder le joueur intéressé d’en savoir toujours plus. L’entrée en matière n’est d’ailleurs pas très bonne, à tout point de vue (réalisation qui semble provenir d’une version précoce du jeu, acting vraiment série B), pour finalement nous présenter tout le charisme de Days Gone qui va crescendo jusqu’à la scène finale. Avec des personnages secondaires attachants, qui ont de belles histoires à nous raconter sur qui ils sont et d’où ils viennent (et ce qu’ils ont traversé de terribles pour certains d’entre eux), l’univers de Days Gone est finalement très travaillé, particulièrement accrocheur pour qui aime l’apocalypse et ce qu’elle entraîne.
Ceux et celles qui reprochent d’habitude aux jeux post-apocalyptiques mention Zombie de trop faire dans la dérision et l’excès devraient particulièrement aimer le ton de Days Gone, celui-ci étant vraisemblablement ce qui se fait de mieux en « The Walking Dead » vidéoludique. Dans le jeu de SIE Bend Studio, on ne rigole pas avec la menace Zombie, vraiment capable de tuer grâce à son nombre. Les personnages secondaires et les ennemis ne sont pas là pour rigoler. On ne prend pas une arme pour faire de la purée de Zombie dans Days Gone, comme dans un Dying Light. Non, on essaie de faire de son mieux dans un monde complètement ravagé par l’apocalypse, et on évolue dans un quotidien qui n’a rien de foncièrement comique…
Days Gone – L’apocalypse, la vraie
Outre les personnages principaux, l’écriture des différents protagonistes est excellente. Chaque âme possède son histoire, son passé, son propre caractère. Sans tomber dans les clichés bas de gamme, on évolue avec Deacon dans un univers proche de celui de Daryl de The Walking Dead. Un biker dur à cuire qui n’a pas sa langue dans la poche, en beaucoup plus sociable. Au fil des heures de jeu, vous serez d’ailleurs amené à rencontrer des humains à la psychologie et aux moeurs variables qui apporteront toujours plus de background à Days Gone. Un travail énorme a été fait de ce côté là, et cela se ressent vraiment en jouant. Le titre n’a rien de générique, bien au contraire.
Se déroulant plus ou moins deux ans après l’arrivée des premiers morts-vivants, infectés ou Zombies (à vous d’en débattre sur l’appellation exacte !), la région des USA présentée par SIE Bend Studio porte les cicatrices de l’apocalypse. Zones complètement dévastées, villages fantômes, semblant de civilisations en reconstruction, humains ayant fondu un boulon, régions sous contrôle des infectés, la province américaine est en proie à un théâtre tantôt abominable, tantôt plein d’espoir pour reconstruire un monde meilleur.
Avec les missions du NERO, vous en apprendrez d’ailleurs davantage au fil de l’aventure sur le pourquoi du comment le monde a été ravagé par cette apocalypse, tandis que Deacon doit sans cesse composer entre son passé, son présent et son futur. Une approche excellente de l’apocalypse, pour une direction artistique vraiment solide en termes d’environnements et de narration, même si de vilaines erreurs ont été commises par les développeurs, chose que nous aborderons plus tard dans ce test de Days Gone. En somme, les amateurs d’urbex seront aux anges en explorant des cités ravagées et abandonnées, tout en arpentant le monde en moto.
Un terrain de jeu immense, bourré de choses à faire
Un open world au service du gameplay
Sans vous spoiler quoi que ce soit, sachez que la map de Days Gone est immense. Bien peuplée en villages et autres zones de vie dans le monde d’avant, cette carte est également très amusante à parcourir et à exploiter grâce à un gameplay vraiment bien ficelé. En dehors des missions principales et quêtes annexes qui tournent autour de 4 ou 5 modèles de jeu différents (aller chercher quelqu’un ou quelque chose, vider un campement, faire une course-poursuite à moto, suivre la piste de quelque chose etc.), vous devrez également pas mal fouiller tout ce que vous voyez et trouver pour survivre.
En effet, là où Days Gone va bien plus loin que les autres jeux post-apocalyptiques en monde ouvert est ce réel sentiment d’être en situation de survie dans un monde plus qu’hostile. Il faudra sans cesse visiter les maisons, désosser des voitures et fouiller les cadavres pour récupérer des vivres qui vous serviront à toute la composante RPG de Days Gone.
Architecturé en plusieurs campements, le jeu de SIE Bend Studio vous permet en effet d’améliorer les aptitudes de Deacon, de sa moto, mais aussi de faire évoluer les campements en accomplissant des missions pour chaque chef de camp. Days Gone n’est pas une simulation de survie en monde post-apocalyptique, mais vous devrez tout de même faire ce qu’il faut pour faire évoluer ces campements. Il est d’ailleurs bon de noter que vous pourrez vous occuper de tout ce pan « RPG » en même temps qu’en effectuant les quêtes principales et annexes, pour une structure vraiment libre du jeu qui ne vous impose jamais rien dans un ordre totalement prédéfini. Appréciable.
En parlant de liberté, il est également bon de noter que Days Gone ne vous oblige pas à jouer en mode bourrin ou en infiltration. Les deux possibilités fonctionnent aussi bien l’une que l’autre, tandis que le cycle jour / nuit permettra aussi de varier les approches, la météo et ce cycle jouant sur les réactions des ennemis humains et des zombies. Nous aurions peut-être aimé un peu plus de clareté sur les intitulés de mission. Il n’est en effet pas toujours simple de savoir si la quête que nous avons choisi est une quête principale ou secondaire, leurs titres et descriptions n’étant pas toujours très clairs.
L’inexpérience et la maladresse de SIE Bend Studio
Un rythme parfois décousu
A ce stade de lecture de notre test de Days Gone, vous devez déjà vous demander pourquoi la note finale n’est pas plus élevée que cela. Il est donc temps de passer en revue toutes les choses qui ne vont pas très bien dans le premier gros projet de SIE Bend Studio, ayant toutes pour source un manque de maturité des développeurs et d’expérience à ce niveau de développement d’un jeu si ambitieux.
La première déconvenue qui frappe est le rythme parfois très curieux de Days Gone. Alors que le trio « scènes cinématiques / missions principales / quêtes annexes » roulent du tonnerre la plupart du temps, de grosses phases de vide peuvent arriver subitement, sans raison apparente. A trois ou quatre occasions durant notre aventure, nous avons du aller faire des petites tâches comme par exemple la desinfestation d’une zone pour que le titre nous propose à nouveau des missions principales et secondaires. Comme si les quêtes se bloquaient à un moment donné. Etrange.
Mais la source la plus grande de déconcentration et de sortie d’immersion est sans conteste les temps de chargement de Days Gone. Le premier est très long, ce qui est normal, et la map n’a d’ailleurs pas besoin de temps de chargement pour s’afficher d’un seul bloc une fois votre partie lancée. Quand on commence une mission en revanche, l’enfer des temps de chargement à répétition débute ! Sur une quête classique, il n’est pas rare d’avoir entre 5 et 6 coupures entre 10 et 30 secondes pour que le jeu charge la suite. Avoir un écran noir après une scène d’action comme un gros gunfight a le don de briser l’immersion, ce qui est vraiment dommage.
Des problèmes techniques pénibles
Ces temps de chargement étonnent d’ailleurs particulièrement plus quand on sait que d’autres missions se déroulent sans aucune coupure. Pourquoi ? Nous n’en savons rien, aucune logique ne pouvant être vraiment déduite de cette structuration de Days Gone. En revanche, il semblerait que les accès disque (dur) souffrent beaucoup lorsqu’on arrive un peu vite à un campement ou à une zone d’action, la console se mettant alors à ramer comme une folle pendant quelques secondes. Présents aussi bien sur PS4 Pro que sur PS4 classique, ces ralentissements à moto sont vraiment pénibles, même si, heureusement, ils ne durent pas très longtemps.
Sur la première génération de PS4 (comprenez par là, non « Pro »), Chris relève également des textures qui ont du mal à charger par endroit, chose que nous n’avons pas vu sur PS4 Pro. Quelques bugs sont d’ailleurs encore présent malgré les 35 Go de mises à jour apparus depuis la sortie de Days Gone. On pensera par exemple à un GPS qui ne fait parfois pas apparaître le trajet sur la mini-map, à des sons qui ne sortent pas (morceaux de phrases et effets audio) ou à des I.A qui restent par moment coincées (tout comme notre moto que vous verrez sur le screenshot ci-dessous, pour un bug apparu une seule fois en 35 heures de jeu). Cela sera sans doute corrigé par d’autres mises à jour, mais c’est toujours déplaisant de voir de telles erreurs couper toujours un peu plus l’immersion dans un jeu vidéo.
Un étirement inutile de l’intrigue
Enfin, toujours du côté des points négatifs du jeu, nous avons l’impression que Days Gone a été trop étiré inutilement. Ce n’est pas que l’ennui s’installe, mais il y a clairement des moments dans l’aventure où vous aurez l’impression de n’être qu’un coursier en faisant quelques missions trop répétitives à la chaîne. Ces problèmes de rythme surviennent d’ailleurs en même temps où les scénaristes ont prévu des scènes cinématiques qui n’arrivent pas à se démarquer, en relatant des faits qui auraient pu être implicitement compris par les joueurs.
Fait rare dans un jeu vidéo, mais qui prouve que trop en faire n’est pas non plus une excellente idée, les développeurs ont trop insisté sur certains traits scénaristiques. L’intrigue n’étant pas compliquée à saisir, on aurait pu se contenter d’une narration plus compacte, et encore une fois moins étirée inutilement. De même, les retournements de situation patissent de ce manque de maîtrise de la narration et de la mise en scène.
D’ailleurs, si le scénario est passionnant à suivre, sa mise en scène n’est pas exempte de tout défaut, en n’arrivant jamais à émouvoir suffisamment les joueurs. Les inspirations narratives à The Last of Us, God of War ou Uncharted 4 sont là, fonctionnent, mais n’arrivent jamais à décoller pour rendre les choses sinon mythiques, inoubliables. Encore une fois, on sent clairement l’inexpérience et la maladresse de Bend Studio à ce niveau de production. Avec une potentielle suite, on espère que la maturité gommera ces vilains défauts qui sont loins d’être rédhibitoires, mais assurément présents.
Des ambitions réelles, qui fonctionnent
Des graphismes vraiment superbes
Un ton en dessous d’un Horizon: Zero Dawn et d’un God of War, Days Gone fait toutefois partie des jeux en monde ouvert les plus beaux de cette génération de console. Comme vous pourrez le constater sur les différents screenshots qui ornent ce test, le cycle jour / nuit et la gestion dynamique de la météo confèrent des panoramas somptueux, et des scènes d’une beauté certaine. Le plus impressionnant est peut-être dans l’animation des hordes, pan du jeu qu’on ne souhaite pas aborder dans ce test par souci de spoil, mais très présent malgré tout dans Days Gone. Il est toutefois bon de noter que seule la PS4 Pro pourra apporter une grosse qualité graphique au tout, des concessions ayant forcément du être faites sur PS4 classique sur laquelle Days Gone reste malgré tout très joli.
Une monde qui évolue avec le joueur
Une nouvelle fois, difficile d’aborder l’évolution du monde de Days Gone sans tomber dans le spoil, mais sachez que tout au long de votre aventure, le monde évoluera par plusieurs fois, et de manières différentes. Ce point est une idée absolument fantastique, et ajoute encore un peu plus de crédibilité à un monde qui n’avait déjà pas besoin de ça pour nous faire vivre une vraie apocalypse Zombie. En parlant des morts-vivants, sachez d’ailleurs qu’ils représentent une réelle menace pour les joueurs et les habitants de cette partie de l’Oregon. Bien plus que dans la plupart des jeux du genre !
Days Gone – Un diamant brut à travailler
Pour une première plongée dans le grand bain des AAA, Days Gone est une réussite qui n’a pour défaut qu’une trop grande ambition de SIE Bend Studio. Cette volonté de créer un jeu si ambitieux s’est en effet heurtée à des moyens humains encore un peu jeunes en expérience, mais qui assure toutefois une solide aventure à vivre dans la peau d’un Deacon Saint John très charismatique. Tout au long de la petite quarantaine d’heures que nous avons passé dans Days Gone, nous avons eu énormément de plaisir à arpenter ce monde dévasté et à suivre une trame très intéressante. Si Sony souhaite faire de ce titre une nouvelle licence, cela promet une suite passionnante, à condition de gommer les défauts de ce premier essai déjà très convaincant. Pour une première production de cette ampleur, on peut d’ailleurs féliciter SIE Bend Studio !
Verdict : 16 / 20