Test de Thief

Réalisation technique

Thief est un projet qui a été mainte fois décalé et surtout victime de quelques problèmes pendant son développement. Le problème est que ces soucis sont visibles sur la version finale du titre. Bien que, dans l’ensemble, le jeu s’en tire avec les honneurs, certains critères sont tout bonnement tirés de la génération précédente. Textures baveuses, modélisation des personnages digne d’une génération PS2 et des cut-scenes vraiment à la ramasse, par exemple.

De plus, le jeu se permet même de ramer à certains moments, atteignant au maximum les 30 fps. Oui, le seuil des 30 fps est bien le seuil maximum, et Thief souffre parfois de chutes de framerate assez violentes. En plus de faire ramer régulièrement le jeu, cette gène de fluidité est visible autant dans les phases in-game que dans les scènes cinématiques. Pour un jeu porté sur next-gen, on s’attendait à mieux…

Mais si l’aspect purement technique de Thief n’est pas des plus impressionnants, certains passages se révèlent plus jolis, notamment grace à quelques effets d’éclairages et de brouillard qui donnent un petit, je dis bien petit, cachet next-gen, pour ainsi accentuer l’immersion. N’étant pas une baffe graphique et faisant globalement moins bien que la majorité des titres déjà disponibles, Thief ne fait pas jeu de nouvelle génération et accuse malheureusement le coup de ses multiples problèmes de développement.

   

Direction artistique

Même si l’aspect technique n’est pas véritablement au rendez-vous dans Thief, sa direction artistique est quant à elle d’un autre niveau. Eidos Montréal a réussi, malgré les soucis, à créer une véritable ambiance et surtout une atmosphère assez réussie donnant un cachet à la ville de noirceur et de mélancolie. La ville est globalement bien distincte entre ses différents quartiers, mais toujours plongée dans la nuit, fait expliqué par ailleurs par le scénario. Le brouillard, omniprésent, confère à Thief une atmosphère qui se différencie d’une belle manière de la concurrence, même s'il est dommage que la brume ne sert pas énormément le gameplay.

Il en ressort de cette direction artistique un environnement bien travaillé, où chaque détail apporte son petit effet à l’immersion du joueur dans la peau de Gareth. On regrette, à la manière d’un Remember Me, que ce beau travail d’ambiance réalisé sur le titre ne permette pas véritablement une possibilité d’explorer le jeu à sa guise. Plutôt typée médiéval, la période historique de Thief est assez bien retranscrite avec quelques points de SF assez bien intégrées.

Level design

Le level design de Thief, ou la grosse promesse qui se révèle être une illusion totale. Si vous espériez de Thief pouvoir vous la jouer Corvo dans Dishonored, vous allez être déçu. Thief vous cantonnera obligatoirement à des larges couloirs, ou du moins à des parcours déjà prédéfinis par les développeurs. Entendez par là que le level design de Thief se révèle être au final assez pauvre, et la multitude de solutions que Eidos nous vante n’est pas véritablement d’actualité.

Plusieurs moments d’incompréhension, dus à la pauvreté du level design, vous mettront soit la rage, soit vous forceront à éteindre votre console. Parce qu’il faut un exemple pour illustrer cette situation, vous pourrez prendre un verre sur une table pour faire diversion, mais si vous vous ratez dans votre action, et qu’il se trouve qu’il y a un deuxième verre à proximité sur la même table, vous ne pourrez probablement pas le prendre. D’autres problèmes liés au level design viennent ternir le tableau, notamment les différents embranchements possibles. Généralement, il se peut que vous ayez deux, voire 3 chemins au maximum pour accéder à votre objectif, pas plus. Enfin, toutes les voies sont balisées par des tâches blanches (marques qui vous indiquent que vous pouvez grimper), ou des objets colorés en bleu qui indique les objets interactifs (fenêtre, détecteurs… ). Aucune liberté n’est donc autorisée mis à part quelques chemins ou quelques situations quand les zones s’élargissent, qui sont plus ancrées à vos choix pour atteindre votre objectif. Toutefois, vous serez probablement amenés à vous diriger tous droit tant les difficultés pour essayer de faire varier les situations sont difficiles et que l’IA est tous le temps aux fraises.

A présent, abordons l’IA de Thief. Rares sont les jeux d’infiltration avec une IA correcte, mais Thief ne fait aucunement partie de cette liste. Le titre possède une IA déplorable. Déjà, celle de Dishonored ne volait pas bien haut dans mon estime, mais celle de Thief est au final à des années lumières de celle de Arkane Studios. Le jeu se repose énormément sur le fait d’être dans des zones éclairées et des zones sombres. Bien évidemment, l’une vous mettant à découvert et l’autre vous rendant très discret, si ce n’est invisible, au point que des gardes peuvent se situer à un pas de vous sans vous détecter.

De plus, Gareth ne peut sauter mais peut néanmoins glisser sur une longue distance pour ainsi passer une zone rapidement sans vous faire détecter. En plus d’être assez "cheatée", l’IA ne va jamais vous repérer dans vos multiples glissades ou ne fera au pire, qu’attirer légèrement leur attention sans qu’ils vous débusquent. Malheureusement, l’expérience de jeu est vite entravée par ces comportements ridicules et incompréhensibles, qui finalement vous donnent plus l’impression de faire un parcours d’esquive de plots que de véritablement interagir avec des gardes qui cherchent à vous débusquer…

Enfin, la cité n’est pas véritablement un lieu d’exploration, car celle-ci se retrouve segmentée en plusieurs quartiers qui sont tous aussi divisés en autant de loadings. Il se peut, avant de commencer un nouveau chapitre, que vous deviez vous rendre sur un lieu à l’autre bout de la cité. Pendant votre parcours, ne vous étonnez donc pas de retrouver quatre, voire cinq loadings pour accéder à votre place de rendez-vous sans avoir commencé le chapitre en question. De plus, si vous avez le malheur de vous tromper de chemin, des loadings supplémentaires feront leur apparition. Le côté exploration de la cité se retrouve être très bref, mais les multiples temps de chargements viennent empiéter sur cet aspect découverte de la cité, et ne cessera d’interrompre votre parcours à plusieurs moments.

Gameplay

Le gameplay de Thief est finalement assez basique tout en étant efficace. Une liste de compétences peut être améliorée continuellement au fil du jeu, ces compétences pouvant augmenter votre discrétion, vos butins pendant vos différents vols dans les habitations ou sur les habitants, votre puissance pour assommer vos ennemis et autres petits services pouvant bien vous servir pendant l’aventure. Néanmoins, sachez que ces compétences ne sont pas indispensables pour terminer l’aventure. Vous pourrez en effet très bien finir le jeu sans augmenter une seule de celles-ci.

Question armement, Thief est un jeu d’infiltration et non un jeu d’action ! De ce fait, il est question uniquement de flèches pour ainsi frapper à distance, avec différentes variétés, allant de la simple flèche en acier pour tuer vos ennemis ou encore des flèches humidifiées pour éteindre les flambeaux. Tout votre arsenal sera davantage porté à vous dissimuler ou à créer des diversions que plutôt de chercher le combat avec adversaires. Comme expliqué dans le level design, le gameplay se retrouve, au final, trop peu poussé à son maximum, faute d’un level design assez pauvre. Même si la prise en main est assez immédiate, on retrouve notamment une sorte de free-run à la Assassin’s creed en restant appuyé sur L2 (console Sony), LT pour les Xbox, et ainsi vous rendre en phase de course tout en pouvant grimper sur les éléments où il est possible d’escalader.

De plus, avec le nombre assez faible d’éléments interactifs et le fait que ne vous puissiez pas vous diriger où vous le souhaiter, ce système de free-run est assez inutile. Il est cependant possible, avec vos flèches humidifiées, d’éteindre les flambeaux et donc de rendre une zone où vous pouvez vous faire détecter en zone "invisible". De ce fait, vous pouvez déterminer votre parcours en vous fiant aux flambeaux que vous souhaitez éteindre, bien que les gardes suspectent quelque chose d’anormale quand un des flambeaux s’éteint subitement. Malgré encore quelques petites idées que nous vous laissons découvrir, Thief ne va cependant pas assez loin dans ce domaine et on se retrouve au final avec un gameplay banal bien qu’intuitif, qui se voit être limité assez vite par la pauvreté du level design.

Scénario

Sans trop vous en dire, il faudra se contenter d’une cité plongée dans l’obscurité et dans la grisaille, forcément maudite par les habitants, où des conspirations vont naître. Parmi elles, une s’essaye avec un caillou magique à créer le mal. Au moment d’empêcher ce drame, Gareth voit un tragique événement se dérouler sous ses yeux. Avec quelques incompréhensions qui lui trottent en tête, dans ses cauchemars de plus en plus récurrents, celui-ci cherchera en même temps des réponses, notamment sur ses mauvais rêves de plus en plus présents et violents. Sur l’écriture du scénario de Thief, il est regrettable que le joueur ne soit pas plongé dans celui-ci, puisque trop banal, et qui manque de profondeur malgré un bon background du jeu. On se détache malheureusement assez vite de l’histoire principale pour se contenter uniquement du gameplay et des différentes phases d’infiltration.

Bande son

Les doublages en français ne sont pas bons, les dialogues sont ennuyeux, et les musiques d’ambiance se font trop rares pour apprécier comme il se doit la bonne direction artistique du titre. L’intérêt de cette bande son réside dans vos pas et surtout dans les endroits dans lesquels vous mettez les pieds. Si vous marchez à proximité de corbeaux ou proche de quelque chose qui peut tomber, les gardes seront directement alertés. De ce fait, la bande son sert pour une fois le gameplay de manière assez subtile et aurait mérité à mon sens un peu plus de profondeur pour ainsi apporter une nouvelle difficulté dans le domaine de l’infiltration.

Durée de vie

Comptez une petite dizaine d’heures pour faire le tour des 8 chapitres qui constituent le solo de Thief. Bien évidemment, pas de mode multijoueur n'est à signaler, mais le titre comporte quand même une certaine rejouabilité. En effet, si vous avez commencé par le mode facile ou normal de Thief, nous vous conseillons de juger les difficultés supérieures pour que l’univers infiltration de Thief prenne davantage son sens, avec moins de bonus notamment. De plus, vous pouvez également créer votre propre mode de difficulté, en activant ou désactivant certaines aides. Chaque niveau contient un nombre précis de trésors à trouver et il est toujours intéressant de trouver tous les objets dans les différents niveaux, pour ainsi débloquer certaines portes dans les levels suivants.

Conclusion

On en attendait surement trop de Thief. Malgré quelques bonnes idées, les années de retard suite à un développement difficile font surgir un goût amer à l’expérience générale. Même si certains niveaux et certaines bonnes idées donnent à ce reboot de Thief version 2014 quelques qualités qu’on ne trouvent pas dans d’autres jeux, la qualité graphique, les loadings incessants pour changer de quartiers dans la cité et la pauvreté du level design viennent gâcher un œuvre qui aurait pu mériter un bien meilleur traitement. La comparaison avec Dishonored sera forcément de mise bien que les deux titres, au final, se révèlent être très différents !

Jouant uniquement sur l’infiltration comme on l’aime, il est regrettable que Thief ne soit pas ou plus une référence du genre et que des jeux comme Hitman, Mark of The Ninja ou bien même Dishnoned fassent beaucoup mieux que lui de part une IA globalement mieux gérée, mais surtout avec un level design bien plus recherché. Malgré une belle ambiance et une direction artistique recherchée, on aurait aimé se sentir libre dans cette belle cité, libre de nos actions, plutôt que de s'y sentir à l’étroit, avec des chemins déjà prédéfinis par les développeurs sans un zeste de logique. Un reboot non convaincant en somme, qui, malgré toute l'affection que nous portons pour Garrett, ne nous aura pas transporté comme on aurait pu l’imaginer. Non pas un mauvais jeu, mais clairement loin d’être indispensable.

Verdict : 11 / 20

  • Sadako

    Journaliste gaming et high-tech depuis 2009, je suis "Vanlifer" depuis 2021, dans mon camping-car équipé pour travailler sur les routes tout comme pour profiter de bons moments de détente !

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