Lancé en 2014 par Ubisoft, la licence Watch Dogs est passée par bien des chemins. D’abord montré comme étant le premier gros virage next-gen avec la présentation E3 « bullshitée » qu’on a retrouvé ensuite moddée sur PC, le premier opus a subi la rage et le désarroi des joueurs obligeant Ubisoft à revoir sa copie. Pour autant, ses chiffres de vente n’étaient pas si mauvais, loin de là même, puisque meilleur démarrage de licence dans tels pays, meilleur lancement next-gen par là, les superlatifs commerciaux étaient tout de même là pour contrebalancer la dépression des joueurs. Mais Ubisoft n’en est pas resté là, et a donc décidé de renouveler l’expérience avec un poids lourd : faire de Watch Dogs non plus une licence qui met de la poudre aux yeux pour au final être du flan, mais de faire de ce nom une véritable série avec son pesant de gameplay, son univers de hacking et de sortir du lot, coûte que coûte. Et il le faut bien, car il représente LA sortie de Noël d’Ubisoft en 2016. Verdict ? Réponse dans notre test de Watchs Dogs 2 réalisé sur PS4 Pro, via une édition Blu-ray commerciale offerte par Ubisoft.
Welcome to San Francisco, bitches
Marcus, voilà le prénom de notre héros. Exit Aiden Pearce et son désir de vengeance, on retrouve ici un jeune afro-américain, tout dans le délire et dans le swag vestimentaire, qui prend place dans une ville de San Francisco qui fait mieux vivre que notre ancien Chicago. Marcus est suppléé par une belle bande de potes, faisant partie de l’organisation Deadsec. Le but est bel et bien de reprendre l’univers de Watch Dogs afin de donner une autre vision du monde, avec ici comme principal objectif l’anéantissement de Blume, contrôlant intégralement le CToS pour sa poire. Et le premier constat positif que l’on peut faire de ce Watch Dogs 2, c’est bien son lieu d’action. San Francisco pête la classe, et à défaut d’un open-world à la Mafia 3 artistiquement réussi mais qui ne donne pas envie d’être visité, WD 2 rejoint plus GTA 5 de ce côté là. Il s’en passe des choses, à San Francisco. Entre les passants qui vivent leur vie, la circulation qui dépend de la journée, les agressions dans les quartiers chauds, les dialogues des PNJs qui se baladent à mourrir de rire, bref tout un mode de vie est retranscrit de belle manière. En fait, on pourrait même aller jusqu’à dire que cette représentation là, de cette manière, c’est du Watch Dogs, et donc que la licence instaure sa vision dans un milieu pourtant concurrencé.
Si il ne va pas aussi loin que les monstres de Rockstar, il s’en tire très bien sur ses scénettes hors missions, sur les choses qu’Ubisoft a envie de nous partager, sur certaines réalités qui peuvent alarmer. Quand on prend la paire Facebook / Google, baptisée dans le jeu Nudle, on s’aperçoit que le rapprochement est facile et surtout que le ridicule donné à certaines phases en disent bien plus qu’il ne parait. Reprenant des faits d’actualité du moment comme les actions d’Anonymous, l’église de Scientologie, le Big Data et la vente et corruption de données dans des milieux peu catholiques, Watch Dogs 2 étale tout mais ce, de manière intelligente et lucide. Le ridicule ne tue pas, et peut, au contraire, en dire bien plus qu’un simple humour second degré. Plus que malin, Ubisoft a aussi tenté un coup marketing surprenant et potentiellement marquant dans le jeu même, avec une mission bien spécifique (c’est une mission secondaire où il faudra au préalable, pirater un téléphone d’un employé d’Ubisoft. Mais chut, nous n’en dirons pas plus…)
Mr Robot X Person of Interest X Soirée X
Quand on regarde la vision de Chicago du premier opus, on se dit que bien des choses ont changé. Et d’une part, c’est le gameplay, la base du renouvellement qui marque le coup. Même si notre héros, là aussi, est l’élément central de nos actions et de nos mouvements, sachez que vous êtes ici aidé par deux nouveaux gadgets, un robot et un drône, le deuxième étant achetable si vous le souhaitez, qui permettent de donner plus d’ampleur au gameplay. Mais pourquoi, me direz-vous ? Tout simplement parce que ces deux gadgets apportent la rondeur, par le robot, et la verticalité, par le drône, dans des zones de jeu habilement designées. En réalité, la plupart du temps, vous allez devoir pirater un ordinateur, un système CToS, ou alors voler des données. Pour y arriver, pas mal de choix sont proposés. On rejoint ici un élément plus actuel, à savoir la liberté d’action dans nos mouvements et dans notre volonté d’atteindre l’objectif. Si des jeux comme Dishonored dans la conception, et MGS V dans le gameplay donnent clairement le choix au joueur, Watch Dogs 2 se place aussi sur une belle place dans le classement. Sachez que mis à part certains points où Marcus est obligé d’aller sur place, vous pourrez très bien faire le niveau avec votre robot, votre drône étant moins équipé pour le piratage (ce serait cheaté, en même temps…).
De plus, il est possible en intégralité de faire le jeu sans utiliser une arme létale, et de simplement s’aider des caméras nous avoisinant pour déjouer les ennemis. C’est d’ailleurs un point fort du jeu, qui, au lieu de nous imposer d’utiliser telle ou telle spécificité ou tel ou tel gadget, le joueur fonce et fait comme il souhaite. A lui d’analyser la zone, afin de savoir quel élément de son inventaire ou quelle compétence pourrait l’aider à arriver à l’objectif. D’autant plus qu’il n’y a pas de bonne ou mauvaise solution, vous pouvez très bien tout exploser à la grenade et vous faire un trip Max Payne like, ou alors un côté plus Deus Ex basé sur l’infiltration. Les deux sont possibles, à chaque instant, selon vos envies. Sachez néanmoins que pour l’option « j’explose la baraque », Marcus n’est pas très résistant aux balles et vos ennemis visent très bien.
En réalité, le coeur du jeu et son intérêt se trouvent plus dans l’approche infiltration, car elle permet de combiner votre robot et votre drone en plus des caméras. Et là, c’est d’autant plus intéressant car les caméras permettent de reprendre le contrôle de vos joujoux à tout moment. Il y a donc tout un jeu de disposition, afin de savoir où on peut planquer ses gadgets pour pouvoir les reprendre à tout moment avec la caméra. Bien évidemment, vous pouvez également intéragir avec vos adversaires via les caméras, en faisant sonner leurs téléphones, en déclenchant la grenade sur eux, en créant une diversion ou alors les abasourdir un instant. Mieux encore, vous pouvez également prendre le contrôle de pas mal d’objets autour de vous, allant du chariot élévateur au piratage des voitures à proximité, tout en faisant exploser les bouteilles de gaz à côté, et le tout, à partir d’une caméra ! Une vraie recherche et surtout une volonté prononcée de rendre le côté hacking intéressant mais également un brin stratégique, sans trop forcer, mais habilement conçu pour nous donner l’envie de progresser de cette manière pendant tout le jeu.
Tout ce level design combiné à un gameplay efficace tient aussi bon grâce à son scénario solide. Bizarrement, et c’est peut être le point où on l’attendait le moins, Watch Dogs 2 se démarque par son histoire, un peu « nanar mais clairement assumée, qui apporte beaucoup de légèreté mais aussi de vraisemblance dans l’écriture. Le conflit au départ est simple, mais les différents événements qui ont lieu dans l’aventure renforcent notre cohésion du groupe Deadsec. Les membres de la team ont leurs traits de caractère bien distincts, et bénéficient pour chacun, d’un bon doublage ! Des blagues potaches très 2016 sont là, pour un Ubisoft qui a décidé de faire de WD 2 un jeu au franc-parler, avec des discussions de comptoir et des délires de fin de soirée tordants. De Josh le phobique social qui ne ressent jamais rien, à Wrench le bagarreur de la bande qui aime se marrer et Citara la nana mesurée dans le discours mais pas dans la tenue, on a avec nous une belle équipe ! Cette écriture, fun et très identitaire, permet de rester accroché au jeu. On est jamais à l’abri d’un passage bien fandard, ultra potache et second degré, d’une mission avec un objectif ouf ou bien simplement d’une conversation avec un « Deadsequeur » sur un sujet complètement débile.
Un petit mot tout de même sur le mode en ligne de WD 2 qui reprend quasi de manière similaire tout le concept de hacking d’un autre joueur et de s’infiltrer dans sa partie à tout moment, si ce dernier est bien évidemment connecté. Le principe fonctionne toujours, ne déchaînera pas les foules sur la durée, mais a le mérite d’apporter ici et là quelques nouvelles fonctionnalités qui font toujours plaisir une fois le très bon solo terminé. Un multijoueur déjà connu, mais pour le moins efficace, qui marche à l’heure où nous écrivons plutôt correctement. A défaut d’une disponibilité au lancement, mais bon, on commence à en avoir l’habitude…
Classe quand t’es Pro, moins quand t’es Fat
Question technique, sachez que notre test a été intégralement réalisé sur PS4 Pro, mais nous avons pu assister à quelques séquences de gameplay sur One et PS4 qui nous donneront un point de comparaison. Dans l’ensemble, c’est unanime, le jeu s’en sort bien techniquement. La gestion de l’éclairage, l’animation de la ville qui nous entoure, le nombre de détails à l’écran, bref tout un tas d’éléments physiques présents en masse et chouettes visuellement donnent le ton. On retrouve notamment des modélisations vraiment belles, certains panoramas délicieux et des effets de volumétrie ici et là globalement corrects. La végétation, en revanche, fait un peu défaut quand on voit d’autres productions du moment, la gestion des collision pas toujours au point en partie parce que Marcus ne peut pas tout escalader, et du popping qui sort de sa tanière hors centre ville.
Généralement, ça tient tout de même bien la route, mais c’est plus du côté du framerate où les choses pêchent davantage, puisque le jeu n’arrive jamais à tenir le cap du 30 fps quelle que soit la situation. Il y a toujours un hic ici ou là, et ce de manière régulière. Le constat en revanche est plus positif du côté de la PS4 Pro, qui montre un lissage et une optimisation d’Ubisoft vraiment sympas. Le jeu est donc en 1800p natif, upscalé en 4K via un traitement post-process, et donne donc une définition supérieure. Si les questions de résolution pas à la valeur exacte vous font peur, ici 1800p, sachez que vous n’allez globalement pas vous rendre compte de grand chose quand vous comparez les deux résolutions, l’upscale faisant globalement très bien son taf. De plus, l’alliasing disparait, et ça, même si nous ne crions pas victoire trop vite, marque le début d’une nouvelle ère. De plus en plus, Ubisoft soigne ses optimisations, et bien que l’éditeur parte de loin, Watch Dogs 2 continue dans cette dynamique là, qu’on salue bien évidemment.
Le hack XL de l’année 2016
Watch Dogs 2 est la réponse idéale. La meilleure punchline balancée de cette fin d’année même. Pour faire simple et direct, WD 2 reprend d’une part les bonnes idées et bonnes mécaniques du premier pour en faire dans un second temps un jeu plus riche, plus complet, plus fun et surtout plus intelligent. Le titre a été conçu pour être un titre fandard dès le départ, et on imagine bien les devs s’éclater sur la réalisation et l’écriture tant le jeu est fun et non futile. C’est une belle bande de jeunes, avec qui on délire, on partage et surtout on hack, on hack et on re-hack encore dans des environnements de San Francisco qui pèsent dans le game. On a réussi à rigoler avec eux, le doublage VF marchant bien d’ailleurs, et on regrette au final que ce deuxième opus s’arrête déjà. Si notre avis du premier opus, pourtant positif à l’époque, pointait quelques défauts notables, cette suite propulse la licence sur le niveau du dessus, et ce, de manière intelligente. C’est comme ça que la licence aurait du être conçue dès le départ. Mesdames, messieurs, Watch Dogs 2 (et on aurait pas parié 3 francs six sous sur ces paroles il y a encore 1 mois !) est un incontournable de cette fin d’année 2016. On ne le pensait pas, mais Ubisoft l’a fait, faire de Watch Dogs une très bonne licence de qualité quand Assassin’s Creed ne pointe pas le bout de son nez. Hacking réussi, donc. Et comme dirait Josh, on a bien bouyave notre aventure !
Verdict : 17 / 20