Test de Red Dead Redemption 2

Suite elliptique d’un jeu qui a marqué les esprits formatés PS3 et Xbox 360, Red Dead Redemption 2, RDR 2 pour les intimes, renvoie ses joueurs exsangues à l’époque frelatée d’un Far-west animal et sans fioriture. L’attente était quant à elle à la hauteur des huit années de développement qu’il a fallu à Rockstar Games pour pondre avec diligence ce soft venu d’ailleurs. Mais, chacun le sait bien, derrière l’attente se cristallisent tantôt frustrations, tantôt émerveillements. Une règle tacite à laquelle RDR2 ne fait pas exception. La preuve dans ce test de Red Dead Redemption 2 sur PS4, testé à partir d’une version commerciale sur PS4 Pro achetée par nos soins.

A l’ouest, rien de nouveau

S’il est une chose qui n’esquissait alors aucun doute notoire, c’est la capacité de Rockstar à pouvoir pondre un univers aussi singulier que merveilleux. Inutile de dire que le dernier volet de la saga Red Dead ne déroge pas à cette règle. Tout dans ce monde américain de la fin du XIXème siècle transpire la vie, qu’elle soit humaine, végétale ou animale. Le jeu compte ainsi une farandole d’animaux à découvrir, allant des espèces les plus classiques aux moins banales. Le système de craft que propose le jeu, sans révolutionner le genre, n’en reste pas moins des plus complets : il vous est donc possible de fabriquer pour vous comme pour votre monture et pour peu que vous vous arrêtiez pour faire un feu de camp, des remèdes à partir du bestiaire gargantuesque de plantes médicinales à votre disposition. Attention cependant, une surconsommation d’une plante en particulier entraine nécessairement une accoutumance et baisse son effet sur votre personnage. Il vous est également possible de fabriquer des munitions spéciales (comme des balles fendues) qui augmentent les dégâts infligés aux ennemis. Nous passons bien entendu sur les fonctions « classiques » : la nourriture, qui restaure votre jauge de vie et d’énergie, qui n’aura pas manqué de diminuer au gré de vos pérégrinations.

Et, pérégrinations, il y a. Autant vous dire que si vous n’aimez pas galoper à travers les prés pendant, très, très, très longtemps, RDR2 n’est pas pour vous. Le monde qui entoure Arthur Morgan est tellement vivant et changeant qu’aucun voyage n’est semblable à un autre, mais dites-vous bien qu’il vous faudra une bonne dose de patience pour parcourir les quatre coins de la carte. 

Graphiquement, RDR2 est l’un des plus beaux jeux multiplateformes de cette génération. Des animations faciales, au-dessus de la moyenne, aux zéphyrs qui viennent gentiment déchausser les feuilles de leurs arbres, cette nature parfois sauvage et hostile émerveille et enchante à tout moment. Il se dégage une telle force, un tel tourbillon éhonté, une telle grandeur qu’il est inéluctable pour le joueur de vouloir se plonger de tout son corps dans cette piscine à ciel ouvert qui n’a rien à envier aux meilleurs open-world du moment. Bien évidemment, cette débauche d’énergie ne vient pas sans défauts : au-delà des deux disques que présente l’édition normale, quelques défauts techniques sont à déplorer, notamment un brin de popping sur les éléments qui s’affichent au premier plan, et des bugs de collision dont la récurrence peut parfois déranger plus d’un, mais nous y reviendrons. La beauté enchanteresse des décors évolutifs trouve un écho tout autant féérique dans les doublages et les sons qui entourent le dernier né des studios américains. 

D’un doublage aux petits oignons remarquablement interprété aux sons les plus anodins, tout dans cet univers sonore incruste le joueur au sein du jeu, sans jamais le lâcher. Ainsi, il ne sera pas rare de vous voir rester transi devant votre écran, à ne plus vouloir quitter RDR2, à moins que ses petits défauts ne deviennent trop grands à vos yeux.

Jusqu’au boutiste jusqu’au bout

Dans un océan intarissable de qualités bénies doit résider pourtant quelques points noirs au tableau. S’il est difficile de reprocher au studio américain sa volonté de pousser les limites d’un réalisme outrecuidant, rien ne nous empêche d’en dénoncer la nécessité, si bien qu’il arrive parfois de nous demander si RDR 2 est bel et bien un jeu. La lourdeur d’un gameplay surrané, s’il se targue d’être réaliste, agace plus qu’il n’émerveille, notamment quand le moment venu de fouiller un corps, il affiche les trois mêmes touches. Il faudra aussi compter sur des mécaniques  de déplacement d’une inertie presque insupportable, comme si Rockstar voulait nous faire très vite comprendre que RDR 2 n’est pas GTA, et le message est très bien passé. 

Très loin de la permissivité éhontée d’un Assassin’s Creed ou d’un GTA justement, RDR 2 ne fera aucun cadeau au joueur, et laissera aisément le cheval trébucher sur un rocher trop haut, ou simplement se vautrer piteusement sur un arbre qui s’est affiché tardivement. Tant pis si la marge restreinte de négociation offerte par Red Dead Redemption 2 agace beaucoup. Dans l’ouest américain, on ne fait pas de cadeaux, et RDR 2 n’est pas enclin à en faire aux joueurs. Par ailleurs, ne vous attendez pas non plus à une ribambelle d’options sur les fast-travel. Que vous le vouliez ou non, le processus est très limité et à des années lumières de ce qui se faisait dans RDR premier du nom.

Afficher la volonté d’un réalisme à toute berzingue allant de l’anecdote des testicules équins qui changent de taille selon la température, au rechargement poussé propre à chaque fusil, aurait été une volonté louable, si elle ne se dilue pas peu à peu dans un flot dirigiste et dictatorial : la mécanique de gameplay qui consiste à afficher un noyau de vie qui diminue peu à peu au fur et à mesure des gunfights et autres atteintes physiques est, ma foi, plutôt très classique. En revanche, pour contrer la fuite en avant de la jauge, il ne suffira de rien d’autres que de quelques aliments à glaner facilement sur les corps qui ornent votre chemin. Un jusqu’auboutisme alors à sens unique que la mise en scène spectaculaire parvient, tant bien que mal, à effacer.

Bla, bla, bla, bla, bla

La narration, incontestable réussite de ce dernier opus, taquine une mise en scène, qui, à son tour, taquine la perfection. L’effet et le soin apportés au character design, dans les expressions faciales tout autant que l’écriture et l’évolution des personnages entre eux. Le sytème de réputation quant à lui, ne souffre d’aucune dispute, mais, pêche par son classicisme et par la facilité avec laquelle le joueur peut le contourner. Explosive, violente, sans concession, redoutable, efficace, rocambolesque, la narration et sa mise en scène vous feront passer par tous les états, avec inéluctablement, un passage forcé dans l’ennui.

Dans sa générosité bienveillante (comptez 50 heures pour finir la trame principale) Red Dead Redemption 2 s’empêtre parfois à trop vouloir bien faire, et à trop tendre l’élastique, Rockstar prend le risque de le casser. Certaines missions (pas les plus nombreuses, rassurez-vous) ne présentent aucun intérêt narratif, à part celui de vous trimballer d’un coin à l’autre de la carte, et vous abandonner, une fois la mission terminée, au milieu d’un marécage où régnait jadis un crocodile légendaire. Bien sûr, il reste l’appréciation toute relative d’avoir assisté à un dialogue diablement bien léché, mais qui finalement au terme des 50 heures de jeu effectives, n’aura que très peu de recollections dans votre mémoire de joueur. Par ailleurs, s’il est possible de passer les cinématiques (ce que l’on ne vous conseille absolument pas), il vous sera impossible de passer les dialogues scriptés à dos de cheval. Préparez-vous donc à devoir très souvent scruter la bande inférieure de votre télévision à la recherche de sous-titre, qui parfois, à cause d’un tutoriel constant, sont coupés ou suspendus.

Finalement, ce RDR2 n’est en aucun cas exempt de défauts. Sa lourdeur, ses mécaniques surannées, ses incohérences en forme de voile transparent, ses bugs de collisions machinaux et ses longueurs narratives insufflent au dernier né de Rockstar une mélodie lancinante, tantôt exaspérante de maîtrise, tantôt grelottante d’hésitation. C’est parce que Red Dead Redemption est une célébration : La célébration d’une philosophie jusqu’au boutiste, d’un dogmatisme effréné. La perfection n’est pas un état de fait, c’est une célébration, et si RDR 2 l’avait atteinte, alors il ne resterait plus grand-chose à espérer. Au contraire, c’est un jeu empli de défauts que Rockstar nous offre, mais également bourré de qualités. Au travers de cette histoire grandiloquente, rocambolesque, intemporelle,  mise en scène avec le génie et le brio qu’on connait au développeur américain, Rockstar nous offre l’espoir de croire encore à la perfection. 

Raide dingue.

Verdict : 18 / 20

  • Sadako

    Journaliste gaming et high-tech depuis 2009, je suis "Vanlifer" depuis 2021, dans mon camping-car équipé pour travailler sur les routes tout comme pour profiter de bons moments de détente !

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