Test de Metal Gear Solid 5: The Phantom Pain

Dire que l’on attendait Metal Gear Solid V: The Phantom Pain est un doux euphémisme. Non pas parce que cet épisode commencé il y a quelques mois avec Ground Zeroes nous surexcite dans l’idée, mais surtout qu’historiquement, il s’agissait pour Hideo Kojima de livrer son message d’adieu, un dernier festin royal pour une licence qui aura persisté pendant une petite trentaine d’années. On ne peut pas oublier Metal Gear, et surtout son créateur, son maître étalon, qui a décidé de mettre les petits plats dans les grands pour briller une dernière fois. Big Boss doit partir définitivement avec les éloges, avec quelque chose de brillant et d’original pour la série. Kojima l’avait préalablement déclaré : Metal Gear Solid V sera un MGS open-world avec les meilleures techniques d’infiltration et des conceptions de missions jamais vues. Car si la consistance de la recette servie en ce 1er septembre n’est pas exempte de tout défaut, il faut tout de même avouer qu’on passe sur une autre dimension incroyablement plus riche et innovante pour la série.

Big Boss is the Boss

Petit point crucial pour le début de ce test, et cela concernera beaucoup les joueurs qui n’auront jamais touché à un seul épisode de la série autre que Ground Zeroes, qui a pu être offert autant sur le PS Plus ou encore sur le Xbox Live : The Phantom Pain est un épisode assez ouvert scénaristiquement parlant. Il ne nécessite donc pas d’avoir joué intégralement aux anciens épisodes pour comprendre l’histoire. Toutefois, il est clairement préférable d’avoir au moins l’histoire des anciens opus en tête ou de les avoir fait, évidemment, pour comprendre toutes les subtilités du scénario de The Phantom Pain, d’autant que pour un finish-move, Kojima a gâté les fans de quelques twists bienvenus quand on connaît un tant soit peu la série et son créateur. 

En plus d’avoir revu en profondeur le gameplay que nous détaillerons juste après, Kojima nous fait aussi voyager, avec The Phantom Pain. Ce dernier l’avait précisé, le jeu sera désormais un monde ouvert. Quelques détails sont à noter, puisque, si il est vrai que nous pouvons nous balader librement dans les deux zones du jeu, l’Afghanistan et la frontière entre l’Angola et le Zaïre, les zones de missions sont tout de même bien délimitées. De ce fait, vous aurez droit à un secteur de la map, certes ouvert où vous pourrez vous déplacer librement. Toutefois, quand vous passez en mode visite libre, force est de constater que ces deux zones sont vraiment très grandes, avec chacune leurs spécificités. Pour l’Afghanistan, nous sommes en face d’un jeu plus vertical, en jouant plus sur les points de hauteur et les endroits plus vallonnées, alors qu’en Afrique, le jeu est bien plus dense et plat, en jouant davantage sur le camouflage et les conditions climatiques et donc sur la perception des ennemis. 

C’est la grande et la plus mémorable des qualités que Kojima nous a préparé avec The Phantom Pain, son gameplay. Quand on se souvient des errements de rigidité et de souplesse dont souffrait Solid Snake, on se dit que le jeu a été revu en profondeur pour cette épopée. Déjà évoqué dans le test de Ground Zeroes, Big Boss est maintenant bien plus souple et profite de quelques gadgets plutôt bien intégrés, ainsi que d’une palette d’options et de possibilités bien plus vastes que celles entrevues dans GZ. Tout d’abord, un coéquipier, qui pourra vous accompagner pendant toute la durée de la mission dont chacun aura ses particularités, comme scanner la présence d’ennemi à votre place, de profiter de tir de couverture, ou encore d’un soutien pour vous infiltrer plus facilement, sans parler d’autres coéquipiers qui peuvent vous extraire d’une mission plus vite ou encore avoir un arsenal conséquent à disposition.

Avec ce premier bonus stratégiquement bien choisi selon la mission sélectionnée, vous allez pouvoir transporter avec vous 2 armes principales allant des fusils d’assauts, lance roquette, sniper etc, aux deux armes secondaires avec, notamment, le pistolet tranquillisant qui vous suivra de toute les manières jusqu’au bout de votre périple. En revanche, même si toutes les armes sont personnalisables avec ajout de silencieux ou encore de skin de camouflage, Snake aura droit de transporter en parallèle une grande quantité d’accessoires pour un total de 8. Entre les grenades fumigènes, explosives, les largages de munitions, et les différentes mines et charges de C4 possibles, une technique de jouer sur le temps et les moments de la journée a été intégrée au jeu avec le cigare fantôme. Grâce à ce dernier, vous pourrez passer de jour à nuit et inversement à souhait, sans bouger de votre position. De ce fait, vous pourrez apprivoiser une zone entière autant de jour et de nuit, et accomplir certains objectifs plus accessibles à un moment donné de la journée. 

Détail bien plus important qu’il n’y parait, puisque déjà entrevu dans GZ, les ennemis sont vraiment ici centrés au coeur du jeu, car votre manière de jouer (ou de déjouer)  va dépendre vraiment de leurs comportements respectifs. Et de ce fait, on ne connaît que trop bien les quelques errements de l’IA lorsqu’il suffit d’avoir un peu de jugeote ou de lucidité dans la plupart des jeux d’infiltration. Dans The Phantom Pain, on est plutôt agréablement surpris par la palette proposée par les ennemis et de tous les à côtés que ces derniers peuvent avoir pendant que vous tentez de vous infiltrez en base ennemie. Entre les rondes ennemies qui changent selon le moment de la journée (retour de l’importance du cycle jour / nuit), l’importance de la cible à extraire, du matériel à disposition des ennemis afin de savoir si du matos de communication est à anticiper ou non, la variété est de mise. C’est d’ailleurs pourquoi on s’attarde sur ce détail, puisque The Phantom Pain est à ce jour un des jeux d’infiltration avec le plus grand nombre de variables à prendre en compte à chaque début de mission. D’autre part, il faut savoir que pour la série, il sera possible également de la jouer un peu plus brutale que d’habitude avec quelques gunfights bien plus nerveux par moment et une vue FPS ajoutée (pour les réfractaires à la visée des TPS). 

T’es plus souple mais t’a pas le rythme dans la peau 

Et si le gameplay proposé a tout de même évolué dans le bon sens et offre une véritable immersion bien plus crédible, il reste cependant quelques zones d’ombres qui n’excusent pas tout manette en main. En soit, même si il se trouve que le gameplay a du mal à lasser sur la durée, la redondances des objectifs et des missions pourra surement laisser quelques joueurs sur le carreau. Sans vous mentir, on sera cantonné à extraire une cible, en tuer une (qu’on pourra extraire pour remplir dans la majorité des cas un objectif annexe), détruire des documents, les voler … et ce, pour les 50 missions principales proposées et les 150 missions annexes qui constituent The Phantom Pain. Alors certes, la difficulté arrive en voulant accomplir tous les objectifs annexes qui seront intégralement laissés au joueur à découvrir de lui-même, puisque ces derniers ne seront pas notés au préalable sur la fiche de mission. De plus, si certains ont voulu la mort de Kojima avec MGS 4 et ses cinématiques trop nombreuses, ici, c’est la situation inverse. Il n’y en a pas. Ou trop peu. Kojima a voulu briser intégralement tous les scripts possibles et imaginables. Du coup, il ne s’est servi que de quelques scènes cinématiques lors de quelques phases nécessaires, afin de boucler les quelques mystères de ce passage Diamond Dogs. Rien n’est donc mémorable comme l’est Peace Walker ou encore MGS 3 dans leur globalité, bien que certaines séquences montrent toujours que Kojima ne laissera la série à personne d’autre que lui même, et qu’ il adore être dans sa Kojimaception et étonner quand il le faut de la plus belle des manières (cf: introduction du jeu). 

Toutefois, même si la réponse ne sera jamais officiellement donné, une incompréhension générale intervient après les deux tiers du jeu. Ceci n’est pas un ragot, mais les missions en New Game + sont incluses dans la trame principale de MGS V The Phantom Pain. Concrètement, vous allez devoir rejouer les mêmes missions que celles déjà jouées au début du jeu, mais dans une difficulté accrue traduite par une barre de vie moins grande, des ennemis renforcés et des boss plus compliqués à battre qui peuvent vous tuer en un coup. Pourquoi ne pas l’avoir proposé en guise de conclusion pour tous les adeptes du New Game + en fin de partie ? Autant ce n’est pas le fait d’être contre qui nous titille, mais le fait que ces dernières soient imposées. D’une part, ces missions ne sont en réalité qu’un prétexte caché pour combler une durée de vie qui était déjà grande à la base, mais surtout que les joueurs les moins aguerris ne pourront en réalité pas profiter de la fin du jeu à 100% si le New Game + ne les branche pas plus que cela. Du coup, en plein cours du jeu, la narration se casse et le rythme en prend pour son grade. Avec des allers retours incessants à la Mother Base pour X ou Y raisons, le jeu se permet de vous refiler les mêmes missions avec les mêmes cinématiques que celles déjà visionnées. Que s’est il passé pour en arriver là ? Les brouilles entre Kojima et Konami ont-elles eu raison de Big Boss et des objectifs scénaristiques de Kojima ? Toujours est-il que cela ne doit pas être imposé, et que même si ces missions privilégient bien plus l’infiltration que le côté action, ce qui n’est pas pour nous déplaire, c’est une durée de vie bel et bien déguisée avec des missions qui n’ont aucun raison d’y être pour avancer dans le jeu. 

Foxement soigné

Autre grande question sur cet épisode, l’arrivée d’un tout nouveau moteur maison pour Konami, le Fox Engine. Déjà visible en partie sur les PES ou encore sur GZ, il faut avouer que The Phantom Pain arrive sur consoles et PC avec grande classe. Le moteur fait des merveilles. Cet épisode est très propre, très soigné avec quelques effets vraiment à la hauteur des meilleures réalisations techniques actuelles, comme par exemple les tempêtes de sable ou encore les effets de particules déployés avec modération pour un résultat crédible. Sur le plan technique toujours, même si on pourra regretter un peu de popping sur la végétation au dernier moment, le jeu (ici testé sur PS4) ne profite d’aucun alliasing, d’une profondeur de champ assez remarquable ainsi que d’un framerate constant à 60 fps. Même si nous ne jetons pas la pierre aux autres acteurs du marché, il est toujours admirable que ce framerate tienne parfaitement la route, qui plus est dans un open-world, avec énormément d’interactions possibles et parfois énormément de choses à afficher à l’écran. Mais rien n’y fait, le jeu reste parfaitement fluide tout au long de l’expérience. Pour la version PC, on notera bien évidemment un nombre d’images par seconde non figé, des ombres plus fines et un popping inexistant, potentiellement boosté par une résolution jusqu’à 4K selon votre configuration. Mais en soit, même si il serait mentir de dire que peu de différences sautent aux yeux, on notera vraiment un beau portage sur PS4 et Xbox One de MGS V: The Phantom Pain pour un résultat visuel final vraiment très convaincant. 

Question durée de vie, expliquée en partie précédemment, MGS V fait très fort et propose un contenu gargantuesque. Bien que pas nécessairement intéressant à chaque instant, le jeu se décompose en 50 missions principales, avec quelques missions qui peuvent prendre 1h ou 1h30 chacune. En annexe, Kojima a prévu 150 missions secondaires avec une vingtaine d’extractions de prisonniers, une dizaine de destruction d’engins militaires et on en passe. Heureusement, Kojima a anticipé ses soucis de redondance dans les missions proposées pour laisser le développement de la Mother Base aux joueurs. Ainsi, un jeu dans le jeu est dans la partie, avec la gestion du personnel de la Mother Base, la gestion des ressources ainsi que la gestion des équipements. Vous pourrez donc extraire autant vos ennemis que les différents matériaux pour ainsi monter en niveau chaque compartiment de la Mother Base. Vous avez la partie Recherche et Développement qui permettra d’avoir des nouvelles armes que des nouveaux gadgets, la partie renseignements qui vous aidera sur la localisation pour vos missions, la partie médical pour prévoir toutes formes de cachets, l’équipe de combat qui permettra d’envoyer vos troupes faire des missions en parallèle pour ainsi aller chercher des ressources et des PIM (argent du jeu). D’autres plateformes en plus de la Mother Base sont constructibles pour ainsi toujours augmenter du mieux possible votre Mother Base. A noter, que ce test ne prend pas en compte la partie online de MGS V The Phantom Pain, disponible courant octobre 2015. 

Metal Gear Solid V The Phantom Pain nous aura fait vivre une expérience assez incroyable dans tous les sens du terme. On passera par l’excitation suprême avec une réalisation technique impeccable et un Fox Engine au sommet, par un gameplay grandement évolué qui donne lieu à l’un des meilleurs jeux d’infiltrations en monde ouvert jamais sorti jusqu’à ce jour. Toutefois, en délaissant grandement la narration et en étant en panne d’inspiration pour les missions proposées sur le long terme, on retombe vite sur terre après avoir terminé l’histoire. Pour les fans de la première heure qui attendent de The Phantom Pain une histoire prenante comme à la première heure seront forcément déçus, tout comme on comprendra les nouveaux joueurs qui seront vite lassés de la redondance des missions proposées. En résulte tout de même un jeu grandement enrichi, qui manette en main, redonne le blason de meilleur jeu d’infiltration à notre cher Big Boss. Une dernière aventure survoltée, unique en son genre, mais qui n’en sera pas le final en apothéose tant attendu pour une saga qui restera tout de même culte, quoi qu’il arrive. Ok Boss ? 

Verdict : 16 / 20

  • Sadako

    Journaliste gaming et high-tech depuis 2009, je suis "Vanlifer" depuis 2021, dans mon camping-car équipé pour travailler sur les routes tout comme pour profiter de bons moments de détente !

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