Cyberpunk 2077 n’est pas le premier jeu à sortir dans un état considéré, par beaucoup de joueurs et de joueuses, comme pitoyable. Fallout 76 et No Man’s Sky en tête de liste, même si les exemples de sorties « cassées » sont de plus en plus nombreuses ces dernières années. En allant jusqu’à la manoeuvre historique de Sony de rembourser les versions PS4 de Cyberpunk 2077 achetées sur le PlayStation Store, et les diverses autres méthodes peu scrupuleuses, nous pensons que le « cas » Cyberpunk 2077 doit servir à améliorer l’industrie des jeux vidéo sur de nombreux points, en impliquant tous les acteurs du gaming. Vous, nous, eux.
1. Un contrôle qualité chez Sony et Microsoft
Actuellement, les différentes étapes de certification des jeux consoles ne sont absolument pas la garantie d’avoir un jeu sans bug ni crash, et qui respecte ses engagements. Comme le décrit un développeur indépendant sur Twitter, la certification PlayStation Store et Xbox Store n’est qu’un enchaînement de cases à cocher, mais qui ne concernent pas vraiment le jeu en lui-même, mais s’il répond à certains critères comme la bonne attribution des touches ou la capacité d’afficher des messages d’erreur spécifiques aux consoles concernées.
Je pense que cette étape de certification doit être musclée davantage pour les jeux vidéo, qu’ils tournent sur consoles ou sur PC. Des processus de testing doivent être mis en place pour qu’un jeu qui « plante » ou qui fait « crasher » la console jusqu’à l’éteindre ne puisse pas être vendu. De même pour les bugs qui empêchent le bon déroulement d’une mission principale. Cyberpunk 2077 n’est pas le seul dans cette catégorie, puisque Assassin’s Creed: Valhalla et Spider-Man: Remastered par exemple ou encore Fallout 76 avant eux faisaient pâle figure sur consoles et PC. D’ailleurs, à l’heure où je rédige cet article, le jeu d’Ubisoft et celui d’Insomniac Games ont toujours des crashs.
En ce qui concerne l’aspect graphique, la certification pourrait également assurer une expérience similaire aux vidéos de promotion des jeux. Se retrouver avec un Cyberpunk 2077 ou un Watch_Dogs premier du nom aussi faible sur PS4 et Xbox One ne devrait pas arriver. Pas dans cet extrême, en tout cas.
2. Arrêtez de précommander vos jeux vidéo !
Ce point a déjà fait l’objet d’un édito de ma part (à lire ici), mais je trouve bon d’en remettre une couche. Votre responsabilité dans le cas Cyberpunk 2077 ? Avoir précommandé un jeu que vous n’aviez jamais vu tourner sur PS4 et Xbox One (CD Projekt Red s’étant bien gardé de montrer le titre dans cette version avant la sortie). Il peut être tentant de précommander un jeu que vous trouvez intéressant, mais offrir votre promesse d’achat après la diffusion d’un trailer en CGI n’est pas raisonnable, et ne pousse pas les studios à donner le meilleur d’eux-mêmes pour vous charmer.
En 2020, il n’a jamais été aussi facile d’avoir des informations sur les jeux vidéo. Par mon biais, par les autres sites d’actualité jeux vidéo, sur YouTube et bien d’autres moyens. Acheter un jeu avant sa sortie par une précommande, c’est une promesse que vous faites aux éditeurs sur un produit dont vous ignorez parfois absolument tout.
La précommande est efficace pour un produit qui a une notion de stock comme une console ou une édition collector d’un jeu. Mais les jeux dématérialisés, ou en édition physique « classique » (hors rares cas) ne sont jamais soumis à rupture de stock. Il n’y d’ailleurs pas du tout de notion de stock pour les jeux sur le PlayStation Store ou le Xbox Store, les clés et versions du jeu pouvant être générées à l’infini.
Cela ne veut pas dire qu’il est impossible d’être déçu par un jeu vidéo en ne précommandant pas, mais vous éviterez des lancements chaotiques. Je note d’ailleurs que chez beaucoup d’entre vous, les serveurs de Call of Duty: Black Ops Cold War sont encore très capricieux et les crashs assez courants, comme quoi les problèmes peuvent être plus complexes que de simples bugs.
3. Des remboursements plus faciles des jeux dématérialisés
Il est très facile de revendre un jeu acheté au format disque / Blu-ray, mais le cas Cyberpunk 2077, comme tant d’autres auparavant, a montré les limites des achats dématérialisés. Il a fallu attendre la décision de Sony de mettre en place un lien officiel pour que le remboursement de Cyberpunk 2077 soit facile et rapide.
Avec des règles du jeu très contraignantes du côté de chez Sony (il faut avoir acheté ou précommandé un jeu, mais ne jamais l’avoir installé sur une console…), je pense qu’un système plus clair doit être mis en place, puisqu’il est impossible de revendre un jeu digital. Outre un système de revente ou de don d’un jeu dématérialisé, il faudrait vraiment que Sony et Microsoft suivent les pas de Steam qui permet par exemple le remboursement d’un jeu, pourvu que vous n’ayez pas dépassé les 2 heures de jeu.
4. Des campagnes marketings plus honnêtes
Si Cyberpunk 2077 cristallise autant de bruit, c’est qu’il remplit quasiment toutes les cases de ce qu’il faut faire pour s’attirer les foudres des joueurs. Je trouve que les éditeurs ne sont pas assez transparents lorsqu’ils communiquent sur un jeu vidéo. Il y a un léger mieux chez certains, mais il est encore largement impossible de savoir si les images d’une bande-annonce proviennent directement d’un jeu vidéo ou non (en CGI ou in-engine ne sont pas réalistes). Halo: Infinite est un cas récent assez flagrant par ailleurs, avec une séquence de gameplay qui était à des années lumières des bandes-annonces passées. Il serait sorti dans cet état graphique si les joueurs n’avaient pas exprimé leur mécontentement.
Les downgrades sont donc encore trop fréquents dans les jeux vidéo, à cause de campagne marketing qui flirtent toujours avec la publicité mensongère. Watch_Dogs premier du nom est l’exemple qui me vient en premier, mais il est loin d’être le seul. Je ne comprends d’ailleurs pas pourquoi certains éditeurs continuent de fabriquer des trailers en CGI à l’heure où les graphismes des jeux vidéo n’ont jamais été aussi somptueux. Créer des trailers impressionnants, c’est bien, mais être honnête envers ceux et celles qui débourseront plus de 70€, c’est mieux, et tout aussi possible.
Pour revenir au cas Cyberpunk 2077, même si j’y reviendrai plus en détails dans mon test qui sera publié plus tard (via la version PC), nous avons également eu droit à tout un tas d’affirmations et de promesses qui ne sont pas dans le jeu aujourd’hui. Ce n’est pas honnête, et cela a contribué à la grogne des joueurs autour du jeu. Depuis que l’industrie des jeux AAA est largement financée par des actions en bourse, il ne faut tout de même pas oublier que les acheteurs ne sont pas actionnaires et s’attendent à avoir un jeu proche de ce qui leur a été montré, parfois des années durant. Sans parler des développeurs qu’on ne prévient parfois même pas quand un jeu est reporté, alors qu’ils « crunchent » depuis des mois ou des années. Respect, où es-tu ?
5. Une meilleure transparence de la presse mainstream
Le travail de la presse mainstream ne doit pas être de générer de la « hype » pour transformer chaque annonce en usine à clic, mais d’informer les joueurs et les joueuses. Je ne souhaite pas faire de procès d’intention, ou donner de leçon de morale, parce que nous avons tous notre rôle à jouer dans cette « affaire ».
Cela commence, et je m’engage à le faire dès aujourd’hui, par spécifier automatiquement quand un trailer n’est pas représentatif de l’expérience finale d’un jeu vidéo. C’est très simple à mettre en place, et je m’engage à mettre la mention « trailer en CGI non représentatif du gameplay réel » ou une mention de ce genre sous chacune des vidéos que je publierai.
Nous avons un travail d’information à livrer, et pas uniquement un rôle de relai des antennes marketing des studios et éditeurs de jeux vidéo. Je vous conseille également de « faire attention » à qui vous suivez vraiment sur des plateformes comme YouTube, Twitter, Instagram, Facebook ou Snapchat. Le rôle d’un influenceur, par exemple, n’est pas de tester un jeu, mais de répondre à un contrat commercial qui consiste à faire parler (en bien, vous l’aurez compris) d’un jeu vidéo ou tout autre produit de consommation.
Savoir quel type de contenu nous regardons me paraît vraiment primordial pour la compréhension de ce que nous regardons. Les contenus sponsorisés ne sont pas toujours indiqués clairement, puisqu’il n’y a pas forcément besoin de payer un vidéaste pour avoir sa confiance et générer du clic. En gros, il faut de plus en plus allumer notre curiosité pour s’informer, n’importe qui ou presque pouvant, de nos jours, avoir beaucoup d’abonnés sans forcément avoir une belle moralité.
ARK 2 – Un bel exemple de bande-annonce non représentative du jeu
Point Bonus – Le syndrôme de la goutte d’eau
De mon point de vue, Cyberpunk 2077 a « ramassé » pour tous les autres abus de ces dernières années. Anthem, Fallout 76, No Man’s Sky, les AAA buggés made in Ubisoft, les microtransactions abusives d’EA, les plantages serveurs et mises à jour outrancières de Call of Duty, la hausse des prix des jeux exclusifs PS5, Halo: Infinite, les exemples de respect douteux des joueurs et joueuses de jeux vidéo est mis à rude épreuve depuis trop longtemps.
Dans un contexte sociétale qui agrave la colère et les comportements agressifs, Cyberpunk 2077 a été en quelques sortes la goutte d’eau qui a fait débordé le vase en cochant beaucoup de cases à une colère massive exprimée en commentaires. Je vous conseille néanmoins de toujours prendre du recul quand vous êtes face à ce genre de pratiques douteuses. Les développeurs n’y sont pour rien à 90% du temps. Inutile d’aller les insulter quand les décisions viennent de bien plus haut (du côté des billets verts). Quant aux menaces de mort, je ne comprendrais jamais comment on peut en arriver là pour un jeu vidéo.
J’ai également eu un paquet de commentaires agressifs en messages privés et en commentaires ces derniers jours, de la part de joueurs énervés de cette « dénonciation » de mes articles qui ne faisaient que relater des faits. Le fanboyisme dans le gaming n’a jamais été aussi violent et toxique qu’en 2020. Mais à part vous faire bannir et bloquer par tout le monde, vous ne gagnerez absolument rien. Une dictature de la pensée unique tente souvent de s’installer, mais gardez bien à l’esprit que nous avons tous des goûts différents, et c’est tant mieux ! La diversité est une force, pas une faiblesse comme certains le voudraient.
J’ai aussi constaté des procès virtuels sur les réseaux sociaux contre des testeurs de jeux vidéo (hors Cyberpunk 2077). Sachez qu’en ce qui concerne les bugs et autres crashs de jeux vidéo, tous les joueurs ne rencontrent pas forcément les mêmes problèmes aux mêmes endroits d’un jeu donné. C’est d’ailleurs pour cela que le travaille de débugging d’une production est long, pour éliminer le caractère aléatoire des bugs.
Je crois vraiment qu’au lieu de nous énerver, nous devons au contraire regarder ce qui a déchaîné tant de colère pour Cyberpunk 2077, et procéder à des améliorations pour que cela « serve de leçon ». C’est toujours dans l’échec que nous apprenons le plus, et que nous devons tout faire pour mieux faire. Moi, vous, et les acteurs de cette industrie du gaming qui nous font rêver de plus en plus après chaque nouvelle génération !
Une bande-annonce réaliste, qui montre du gameplay