[Edito] The Evil Within - Regard sur la Direction Artistique qui divise les joueurs

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, par Amaury Laguerre (Sadako)

Alors que le Survival-Horror est en pleine renaissance après des années de famine sur PC et consoles, Shinji Mikami renait lui aussi de ses cendres pour proposer au monde entier sa nouvelle vision de l'horreur dans The Evil Within. Testé par moi-même par écrit et en vidéo en duo avec Speedy, le jeu de Tango Gameworks divise pas mal de joueurs sur sa direction artistique. Nous avons donc décidé de pousser un peu l'analyse et de donner notre avis plus subjectivement pour tenter de comprendre ce qui plait, et ce qui ne plait pas aux joueurs dans cet aspect de The Evil Within.

Entre Clins d'Oeil, Fan-Service et Schizophrénie

S'il y a bien un domaine où The Evil Within excelle, c'est bien du côté des divers clins d'oeil et références que Shinji Mikami à placé dans son jeu. C'est simple, l'aventure de Sebastian transpire de fan-service. Tout au long des chapitres, vous pourrez donc voir des monstres ressemblant à ce qu'on peut trouver de pire dans Silent Hill, des machines à écrire très "Resident Eviliennes" placées sur beaucoup de meubles du jeu, une résidence au hall qui ressemble à s'y méprendre au Manoir Spencer, la tête empaillée dans ce même lieu ou encore des textures qui sortent tout droit de Resident Evil 4, et le fameux Zombie qui grignotte une tête en se tournant lentement vers vous sous une toile de tente. Les anciens joueurs qui ont connu les jeux glorieux de l'âge d'or du Survival-Horror auront donc beaucoup de plaisir à observer tout cela, à se voir flatté d'avoir fait d'anciennes perles, tandis que les nouveaux venus passeront à côté d'un patrimoine génétique sans lever le sourcil. The Evil Within, un jeu vidéo fait pour les gamers de plus de 30 ans et plus ?

Avec un gameplay assez rigide, des problèmes de caméra qui rappellent la bonne vieille époque et des salles de sauvegarde (bien que des sauvegardes automatiques existent de manière assez proche les unes des autres), le Survival de Mikami et Tango Gameworks pourrait en effet être réduit à ça, mais ce serait une grossière erreur, tant le jeu est ouvert à un plus large publique. Dans le premier sous-titre de cet article, nous parlons en effet de schizophrénie, terme qui a du trotter dans la tête des designers artistiques assez longtemps, et qui a été particulièrement bien mis en avant. Parce que, oui, The Evil Within n'est absolument pas qu'un cadeau aux anciens fans des Resident Evil, mais a sa propre histoire à raconter, et énormément de doutes à mettre dans la tête des joueurs. A de nombreuses reprises, Sebastian croit qu'il est fou, et le joueur se demande si tout cela n'est pas qu'un cauchemar dans lequel il voit les pires attrocités déjà abordées par des films comme Hostel, Saw ou Massacre à la Tronçonneuse...

La Boucherie Virtuelle

Comme dit plus haut, The Evil Within est une véritable boucherie virtuelle qui démarre à peine la séquence d'introduction terminée. Que ce soit dans le hall de l'Asile Psychiatrique ou dès la première phase de gameplay, on se rend vite compte que le jeu est très gore. Nous pensons d'ailleurs que cette "gore attitude" est un des premiers points qui divise les joueurs. A la manière d'un Hostel, cité lui aussi précédemment, The Evil Within fait dans l'excès, dans l'ultra choquant, la pourriture, les tripes. Mais n'en fait-il pas un peu trop ? Pendant une majeure partie du jeu, on se retrouve en effet parachuté au beau milieu d'immondices, sans que l'on ne comprenne pourquoi, ni comment. Du gore pour du gore, cela à le mérite de nous coller dans une ambiance malsaine, dérangeante, mais aussi de ne pas trop se creuser la tête pour renouveler les sources d'angoisses. Quoi qu'il arrive, The Evil Within est donc très saignant, du sol au plafond en passant par les murs et les ennemis, déformés comme Donatela Versace après son ultime chirurgie esthétique. Certains joueurs aimeront, crieront au génie, tandis que d'autres hurleront que mettre le joueur au milieu d'un tas de merde est tout sauf ingénieux.

C'est par ailleurs ce qui m'a un peu géné personnellement dans mon trip sur The Evil Within, l'impression que Shinji Mikami n'avait pas d'autres inspirations, et la volonté de me faire perdre la tête en me balançant à droite à gauche dans des situations toujours plus gores. Cela a bien fonctionné pendant 2 ou 3 chapitres, puis j'en ai très rapidement eu marre de voir des environnements rouges et marrons, des ennemis qui me ralentissaient plus qu'autre chose, et des mécanismes de gameplay déjà vus et revus dans beaucoup d'autres jeux vidéo. Si encore le scénario étant prenant dès le départ, le problème se poserait un peu moins, mais nombre de joueurs critiquent The Evil Within en lui reprochant son manque d'intérêt pendant quelques heures. En effet, en attendant de comprendre ce qui se trame vraiment dans la tête de Sebastian, et d'entrevoir les ficelles du scénario, il n'y a pas grand chose d'autre à se mettre sous la dent que des boss vraiment intenses et amusants à affronter.

Des Boss qui Défoncent

Shinji Mikami avait parfaitement su designer des boss mythiques dans la série Resident Evil (Tyran, les Hunters, Lickers et autres Nemesis), et il n'a rien perdu de sa superbe dans The Evil Within, qui peut compter sur des ennemis très puissants, gigantesques, mais avec quelques points faibles qui les rendent forcément vulnérables et non invincibles. L'un des premiers boss que vous rencontrerez dans The Evil Within sera la femme araignée, (que l'on appelle par ici la mystérieuse Sadako !), qui représente à elle seule le pouvoir créatif de Mikami. Autre gros point fort, toujours en parlant des boss du jeu, est la manière avec laquelle vous les affronterez. En effet, l'affrontement n'est presque jamais direct. Non, bien au contraire, vous serez amenés à croiser de manière pacifiste le monstre en question, en vous disant intérieurement un "oh mon dieu je vais vraiment devoir me fighter contre ça ?", et en commençant à angoisser du combat final. Cet aspect anxiogène est parfait, et complètement absent du reste du jeu, qui se contente de propulser le joueur dans des couloirs, arènes, labyrinthes qui n'ont rien de bien effrayants. Il y a certes des pièges, mais ceux-ci vous feront crever comme une vulgaire bestiole sans vous faire sursauter ni angoisser outre mesure. Selon nous, les boss de The Evil Within sont donc le point d'orgue de la direction artistique du titre, et mettent tout le monde d'accord.

    

Un Univers sorti d'un Asile de Fou

Encore une fois, si on regarde dans le passé, on se rend compte que Mikami a fait un travail de dingue sur l'univers et le background de la série Resident Evil. S'il n'était pas parti en claquant la porte après Resident Evil 4, la série aurait pu continuer des années durant, en proposant autant de richesse que les premiers opus. Avec The Evil Within, le travail créatif est grand, mais très décousu, et difficilement recyclable pour une suite. Vers le dernier tiers du jeu, vous comprendrez alors que Mikami a eu une très bonne idée pour assembler les niveaux de son jeu, en transformant l'aventure de Sebastian en une sorte de trip sous acide tout droit sorti d'un asile. Plutôt cohérent, donc, dans le fond, mais les joueurs trouveront The Evil Within très incohérent pendant plus de 8 heures. Anormal, et vraiment maladroit. Que pensez, alors de la légitimité artistique de l'oeuvre de Tango Gameworks ?

Si The Evil Within avait été un film d'horreur, et que la période de reconnaissance de Sebastian avait duré entre 20 et 30 minutes, cela serait passé impécablement bien. Dans un jeu vidéo, le risque de ne pas trop en dire est de faire le pari que le gameplay suffira à laisser le joueur éveillé. C'est bien là que le titre divisera les joueurs, pour nous répéter. La direction artistique du jeu est donc à double tranchant. Il y aura ceux qui lacheront la manette en citant une lassitude certaine, et d'autres qui auront fini le jeu et qui n'auront qu'une idée en tête, le recommencer, pour y voir plus clair dans les troubles liens des niveaux et du scénario... De quel côté de la barrière vous situez-vous ? Et pourquoi ? La parole est à vous dans les commentaires !