Test de Nioh

Avatar de Speedy
, par Gregoire Charlier (Speedy)

Quand le projet ONI était annoncé il y a maintenant 13 ans, on s’excitait d’avoir un nouveau RPG pour nos jolies consoles. Et en 13 ans, il y a des choses qui ont changé. Déjà, The Last Guardian et Final Fantasy XV sont sortis, c’est dire que le monde du jeu vidéo reste imprévisble, et le projet maintenant repris pour la team Koei Tecmo a subi bien des changements. Au lieu de vous faire un paragraphe entier sur les différentes versions de développement du jeu, il est juste important de savoir qu’une licence marquante de cette dernière génération a bouleversé les codes de ONI, devenu au passage Nioh. C’est Dark Souls, véritable étalon du studio From Software, respecté désormais de tous, qui a inspiré la team derrière Nioh de passer à l’offensive. Au final, il en résulte que ce 8 février 2016, date de sortie du jeu dans nos contrées, un jeu à l’aura bien différente du projet initial s’inspirant des meilleurs, est disponible sur PS4. Pour le meilleur et pour le pire ? Verdict dans notre test réalisé sur PS4 Pro, via une clé PlayStation Store offerte par Sony.

Nioh, le Dark Souls japonais ?

Quand on parle de l’inspiration de Dark Souls sur Nioh, c’est un doux euphémisme. Déjà, tout le concept du jeu regorge de mécanismes typiques de Dark Souls. Avant toute chose, sachez que Nioh est un jeu d’action / aventure, autant beat'em all que RPG. Sa particularité ? Une souffrance exacerbée où la progression tout au long du jeu ne sera clairement pas un long fleuve tranquille. Bien que certains qualifient déjà Nioh de difficulté "too-much", le jeu prend le fondement de la série des Souls comme pièce de référence afin que le joueur termine son aventure grandi de cette lutte. Premier point à aborder en passant, sa difficulté. Et nous imaginons que la première question sera : "Alors, c’est aussi dur que Dark Souls ?". En partant de ce principe que Dark Souls soit compliqué, Nioh joue dans la même cour, voir parfois un cran au-dessus.

Toutefois, vous vous rendrez compte, tout comme dans Dark Souls, que la difficulté n’en est pas réellement une, et que la véritable barrière sera votre rapidité d’apprentissage. Le jeu est plus vif que la série de From Software, qui n’est pas sans rappeler un certain Bloodborne. Et c’est d’ailleurs plus sur celui-ci que Nioh s’inspire, puisque le titre de Koei joue davantage sur l’esquive que sur la parade. Les deux sont bien évidemment possibles, mais la rapidité d’action (encore merci pour le mode 60 fps) nous fait rapidement comprendre que le jeu ne sera pas une simple confrontation de deux brutasses à la hache, mais bien un ballet dans lequel vous tournerez encore et encore afin de trouver la bonne opportunité de coller des droites au katana. Globalement, le jeu est tout de même un chouia plus punitif que Dark Souls, avec des boss bénéficiant de plus d’attaques qui peuvent vous "one-shoot" et donnent un ressenti de différence de puissance un peu plus faible que dans un Souls. En revanche, pour contrebalancer ça, vous avez aussi plus de fenêtres de tirs que dans les Souls, avec des combos à rallonge ultra jouissifs qui poussent au défoulement, et donc à la faute.

Héros de Nioh, surement un descendant des De Riv.

Techniquement, le jeu de Koei Tecmo ne brille pas. En même temps, pour une fois, alors que je suis un mec à fond dans la technique, cela ne me chagrine pas. Déjà parce que le jeu donne la possibilité de jouer en 60 fps, merci bon dieu, et en plus, bénéficie d’un rendu plutôt honnête sur l’ensemble pour garantir un compromis framerate / rendu convaincant. Pas de baffe technique, une physique classique et peu d’interactions avec le décor, le jeu est aussi à l’origine davantage une école de gameplay plus qu’une démonstration de techniques visuelles. Mais là où le boulot restait à faire, c’était sur le plan artistique où Nioh pouvait du coup améliorer son ambiance et combler les petites failles techniques ici ou là. Et que dire, si ce n’est que c’est quand même bien classe ! Le japon féodal pétarade d’une ambiance pesante, les architectures des bâtiments sont très inspirées, les reliefs proposés originaux, le rendu des couleurs gavé de rouge, formant un tout qui jouit d’un certain cachet qui permet de se sentir ailleurs, et de se laisser "hyper" par une DA soignée. Pour le coup, Nioh fait partie des rares jeux qui arrivent de belle manière à compenser sa technique par une DA correctement ambiancée, et qui, on le répète, nous donne la liberté d’avoir un rendu artistique très chouette en 60 fps.

Nioh, tout n'est qu’une histoire de gameplay

Question gameplay, il était temps de voir à quel niveau Nioh s’est inspiré des jeux From Software. Et bien, à notre grande surprise, sur le concept global et la généralité des commandes, Nioh s’approche de Dark Souls, mais sur la partie purement technique, il joue un peu à part. En fait, et on l'a déjà dit, la ressemblance se tâte plus du côté de Bloodborne puisque Nioh joue davantage sur l’esquive que sur la parade. Bien que les deux soient possibles, la rapidité de l’action avec la vitesse des enchainements ennemis et des vôtres font que le jeu laisse davantage la place à des fenêtres d’esquives rapides ou roulades plutôt que de vrais moments de parade. C’est un jeu plus basé sur le placement et sur la portée de nos coups, avec des fenêtres d’attaque davantage retranscrites à l’écran.

A titre d’exemple, il n’est pas rare qu’un boss de chapitre s’écroule par terre après une grosse attaque, laissant par défaut et de manière très visuelle, un champ d’action pour le frapper. Alors évidemment, le retour sur pattes du boss se fera soit par une AOE qui va vous éjecter du tapis si vous ne l’avez pas anticipé, ou alors les paterns vont se remettre à 0 et ça sera reparti pour un enchainement que vous connaissez déjà. Et de ce côté, on ressent davantage une empreinte Ninja Gaiden, notamment dans les combats au katana, où la science du placement et les fenêtres de tirs sont millimétrés au poil de cul. Pas question de penser que "par chance ça peut passer", car ça ne passera pas. Nioh joue habilement entre cette science du positionnement et de l’attaque rapide de Ninja Gaiden, tout en ayant une philosophie Souls dans la punition et la gestion des paterns ennemis. En résulte un titre au gameplay tout simplement remarquable, qui tutoie les sommets de la technique à certains moments. Et ce, quelles que soient les armes que vous choisissez au début du jeu. Katana, double katana, hache, marteau, lance, bref un arsenal de corps-à-corps allant de la frappe rapide sans gros dégâts à des frappes de bouchers, toutes les armes font en sorte que votre expérience de jeu devra forcément s’acclimater de vos choix et préférences pour celles-ci.

S’ajoutent à cela les familiers qui peuvent être invoqués et vous servent d’attaques spéciales quand votre jauge est pleinement chargée. Un esprit vient donc vous aider en plein combat, et vous apportez certaines caractéristiques et forces de frappes supplémentaires en un temps donné. L’astuce est qu’on pourrait penser qu'à l’image des RPG modernes, ce genre de bonus est un cadeau à utiliser une seule fois pour un combat. Et bien Nioh permet de jouer avec un petit côté stratégique, puisque certains objets consommables peuvent avoir une double caractéristique et donc vous aider en plein combat à remonter cette fameuse jauge. Avec une bonne séance de loot et de farm, il n’est pas impossible de tirer partie de votre esprit bien plus régulièrement que prévu.

Ajoutez à cela un système de posture. Déjà, sachez que vous jonglez entre deux armes différentes, en plus de deux armes de longues distances, ce qui nous amène à quatre. Sachez que pour vos 2 armes principales, un système de posture a été mis en place avec une posture haute, une posture moyenne et une posture basse. On peut bien évidemment jongler entre les 3 à la volée, mais ce qui est intéressant est que les 3 ont des avantages et inconvénients non négligeables, surtout que ces dernières dépendent une fois de plus de vos armes. Il y a donc une troisième composante, de gestuelle si vous préférez, qui va influencer votre manière d’attaquer ou de défendre, puisque vous l’aurez bien compris, une posture comme la posture haute provoquera plus de dommages grâce à des frappes plus lourdes alors qu’une posture basse sera plus adaptée pour l’esquive et l’attaque rapide.

Toutes ces composantes de gameplay sont bien évidemment dosées par une jauge de magie qui pourra, à la manière des RPG classiques, être consommée plus ou moins rapidement selon vos armes, vos déplacements, vos esquives et votre posture. Oui, quand on vous parle de stratégie, on s’en rapproche pas mal.

Une charpente solide !

Une autre composante de Nioh sur laquelle on avait encore quelques interrogations était son level design. Sur ce point, on revient sur un terrain plus classique, puisque le jeu est divisé en missions que vous choisirez via votre map centrale. En plus des missions secondaires optionnelles, certains défis haut level sont disponibles ici ou là afin de tester votre challenge une fois l’aventure terminée. Pour les missions principales, Nioh ne s’est pas embêté comme peut le faire un From Software a créer un vrai véritable royaume dans lequel on visite les différents coins constituant la zone de jeu unique. Nioh ne parvient malheureusement pas à reproduire un univers imposant et un level design construit sur une grande échelle, préférant se focaliser sur des parcelles de jeu bien définies, cloisonnées sur forme de missions.

Cela n’empêche pas certaines missions d’êtres bien construites avec le même objectif de parcours, débloquer les raccourcis des sanctuaires pour accéder au boss rapidement pour votre retry. En revanche, vous ne pourrez pas revenir au début du jeu par exemple par une porte dérobée, là où Dark Souls ou Bloodborne pouvaient impressionner par tant de génie dans l’entrelacement des zones pour créer un univers gigantesque de cohérence. Malheureusement, quand on voit tant d’inspiration ici ou là, on regrette que ce genre de choses ne soient pas présentes, provoquant à notre grand regret un défaut de rythme avec des temps de chargement parfois exécrables. Une fois une mission terminée et donc le boss achevé, c’est "retour road map et on choisit la prochaine mission". Ça reste binaire dans l’exécution et malheureusement, on aurait aimé que Nioh aille au-delà de ce conditionnement classique.

Allez, on termine notre petit tour

Petit détour par la bande son du titre, qui ne nous aura malheureusement pas transporté autant que sa direction artistique. Ok, certains passages peuvent cartonner les oreilles de dynamisme parce que l’action monte d’un ton, mais en revanche, le pesant musical japonais d’une époque plus ancienne ne se fait malheureusement pas sentir. Dommage, car avec un scénario déjà un peu faiblard, une ambiance musicale aurait pu provoquer une immersion encore plus originale pour ce genre de jeu.

Question scénario d’ailleurs, c’est vraiment délicat d’en toucher deux mots. Sachez juste qu'au début du jeu, vous vous retrouvez enfermé et qu'une âme charitable fera en sorte que vous sortiez. La quête de rage sera un peu le chaînon principal de votre aventure, 90% du jeu étant bien évidemment expliqué dans l’ambiance et les nombreux objets que vous pourrez trouver. En revanche, nous trouvons que de ce côté, des jeux comme The Witcher ou une fois de plus les Souls vont bien plus loin, provoquant la construction d’un véritable univers et d’une cause plus importante, plus subjugante qu’un simple samouraï en quête de vengeance. Nioh va un peu plus loin aussi, mais reste tout de même en retrait de ces véritables référents.

Petit mot sur le multijoueur également, dans lequel vous pouvez inviter un ami afin de finir une mission avec lui. Attention en revanche, seuls les amis ayant déjà fini les missions au préalable pourront venir vous aider. Vous ne pourrez donc pas venir à bout d’une nouvelle mission si au moins l’un de vous deux ne l’aura pas déjà faite. C’était à la base une option qui était censée être disponible, mais les développeurs ont préféré la retirer, jugeant le jeu un peu trop simple avec cette vision.

Ni très oh, mais clairement pas en bas

Nioh est au final un sublime enfant d’un accouchement compliqué de 13 ans. Vadrouillant de projet en projet, d’idée en idée, le résultat final correspond parfaitement à un subtil mélange des meilleurs de sa catégorie. Mais à défaut d’être un simple best-of, il arrive habilement à se différencier dans les détails les plus compliqués, notamment le gameplay, où la technique d’un Dark Souls rejoint brillamment la rapidité d’un Ninja Gaiden ou d’un Bloodborne, avec des mécaniques de postures, de contre et de break parfaitement ajustées. En réalité, mis à part la découpe des missions par zone de jeu cassant le rythme et une histoire en retrait, Nioh titille les sommets de sa catégorie et permet de pas le ranger au rang de vulgaire copie. Un résultat brillant, frustrant de méchanceté tout au long de votre quête, jonglant entre la rage intégrale et la jouissance d’un gameplay redoutable et technique. Un gros mastodonte vidéoludique était donc bel et bien de sortie ce 8 février 2017.

Réalisation technique

14 / 20

Direction artistique

18 / 20

Level design

16 / 20

Gameplay

19 / 20

Scénario

14 / 20

Bande sonore

14 / 20

Durée de vie

17 / 20
  • Un gameplay subtil, intelligent et corriace
  • Une ambiance remarquable
  • Du loots à tout va...
  • Ce sentiment si fort de progresser à chaque fois
  • 60 fps, merci bien
  • Des boss vraiment classes...
  • Quand tu le termines, tu le notes sur ton CV
  • Un bestiaire peu varié
  • Le level design aurait pu être canon
  • ... voire trop même
  • On casse des manettes
  • Une technique pas renversante
  • ...mais ultra relou
  • Le multijoueur pas jouable à 100%

Verdict

17 / 20